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Au-dessus d’un sol chaud et poreux, atteignant par étages successifs de grandes élévations, l’atmosphère a pu amasser ses vivifiantes fraîcheurs, grâce aux immenses nappes marines qui entourent l’archipel. Grossies de celles qui se dégagent des bouches vaseuses de l’Orénoque, ces vapeurs, poussées par les vents d’est sur les flancs et la cime des montagnes, s’y condensent en nuages et en brumes, s’y fondent bientôt en pluies dont la succession dure depuis juillet jusqu’en octobre. La quantité annuelle de pluie dépasse une moyenne de deux mètres. Après s’être dépensée en partie au profit d’une magnifique végétation forestière, cette eau bondit en cascades et forme des cours également précieux pour les campagnes et les villes comme irrigation et force motrice. À vol d’oiseau, le système hydrographique de l’île au lieu de ce réseau ramifié que dessinent les fleuves qui coulent à travers les assises stratifiées du globe terrestre, ne présente qu’une profusion de veines liquides, isolées et indépendantes : elles courent précipitamment du haut des monts à la mer, quand la main de l’homme ne les a pas détournées vers quelque habitation, et entraînent sur le littoral une couche épaisse d’alluvions, terres privilégiées pour la culture de la canne à sucre.

Un peu plus grande que la Martinique[1], la Guadeloupe présente moins d’unité. L’eau et le feu, qui ont formé l’archipel des Antilles, l’une par voie de dépôt et de soulèvement, l’autre par voie d’éruption, se sont partagé les terrains de cette île. La partie occidentale, spécialement, mais improprement appelée la Guadeloupe, offre le même aspect et la même composition que la Martinique, avec plus de grandeur dans le paysage, plus de vigueur dans la végétation : c’est là que fume la Soufrière, cratère crevassé du volcan qui ronge les entrailles de l’île, dont la présence est aussi révélée par de nombreuses sources thermales. Dans la partie orientale de l’île, dite la Grande-Terre, se déroulent au contraire de vastes plaines ; semées seulement du nord au sud, vers l’ouest, de mornes peu élevés. Ce sol, qui s’est lentement émergé, se compose de vastes assises calcaires remplies de coquillages et douées d’une exubérante fertilité.

  1. La superficie de la Guadeloupe et de ses dépendances est ainsi établie par les documens administratifs :
    hectares hectares
    Guadeloupe propre 82,289
    Grande-Terre 55,923 138,212
    Ilots divers 435
    Marie-Galante 15,341
    Les Saintes 1,256
    La Désirade 4,330
    Saint-Martin 5,546
    165,123


    La surface de la Martinique est évaluée à 98,782 hectares.