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appartient incontestablement aux actions de milieu dont l’hérédité ne fait en quelque sorte que transmettre et consolider les résultats.

L’intervention de l’homme apporte-t-elle des élémens, des agens nouveaux dans la constitution des races domestiques ? Au premier abord, on serait tenté de le croire. Dès que l’homme met la main sur une espèce, celle-ci semble s’ébranler. Des variétés apparaissent, des races se forment, d’abord en petit nombre, puis de plus en plus multipliées, et cela sans efforts apparens de la part du maître, comme nous l’avons vu pour le dindon. Si la volonté humaine vient en aide à cette tendance à la variation, celle-ci marche bien plus rapidement encore. Bientôt à chaque besoin particulier correspond une race spéciale, et l’homme obtient de la même espèce le bœuf de trait, le bœuf de boucherie ou la vache laitière, le lévrier, le dogue, le bichon ou le chien d’arrêt. Que le besoin ou le caprice vienne à changer, les races changent de même, et le cheval carrossier de Normandie remplace le destrier que les hauts barons du moyen âge tiraient de la même province. Aujourd’hui on peut dire que l’homme pétrit et façonne certains êtres vivans comme la matière morte. D’un type donné il tire à peu près tout ce qu’il veut. Il rompt à son gré l’équilibre naturel des organismes, et fait des animaux tout graisse comme le porc de Leicester, tout os et tout muscles comme le cheval anglais, tout graisse et muscles comme le bœuf durham, ne laissant des autres organes, des autres appareils, que ce qui est indispensable à l’entretien de la vie. Est-ce à dire qu’il lui suffise de vouloir, et, qu’il exerce autour de lui une sorte d’action magnétique, comme semblent l’admettre quelques auteurs ?