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peu près ainsi dans les centres miniers : environ un tiers d’Américains tenant hôtels, buvettes, grands magasins et dépôts de marchandises, et exerçant les fonctions administratives communales : celles de juge de paix, de constable, etc. ; les Anglais et surtout les Irlandais, occupés à divers métiers ; les Italiens, d’ordinaire jardiniers ou marchands ; les Français, blanchisseurs, bouchers, maçons ou forgerons ; les Mexicains et Chiliens, généralement très peu occupés ; des Juifs allemands tenant magasins d’habits confectionnés ; enfin des Chinois, jardiniers ou laveurs d’or, ordinairement relégués dans un quartier spécial, et souvent dans un faubourg éloigné, où la haine de l’Américain semble encore vouloir les poursuivre. Quelques nègres, savetiers, barbiers ou baigneurs, et quelques Indiens perdus complètent la population. Dans beaucoup de centres, plusieurs centaines d’Indiens, véritables tribus nomades, campent ou rôdent aux alentours une partie de l’année ; ils vivent quelque temps en maraudeurs et se transportent ensuite en d’autres lieux, pour revenir plus tard au même point.

Bien que renfermant parfois 5 ou 600 habitans à peine, les centres miniers ne méritent pas le nom de villages, que l’on pourrait, à cause de cette infime population, leur donner en d’autres pays. Ce sont de véritables villes, à l’état d’embryon si l’on veut, mais qui n’en méritent pas moins un tel nom par l’intelligente largeur des dispositions et l’ampleur de quelques-uns de leurs édifices. On y trouve en outre toute sorte de magasins convenablement fournis, et toujours un grand hôtel au moins. Aux environs sont les placers et les mines avec leur population active et travailleuse. Çà et là s’élèvent de nombreuses cabanes abandonnées. Ces ruines d’une nouvelle espèce, dans un pays si jeune, témoignent d’un passé plus animé encore que le présent. Si l’on s’élève sur une montagne, c’est souvent le vide seul et la solitude que l’on découvre dans le plus lointain horizon, et ce calme étonne et attriste l’âme dans une contrée qui paraît si agitée à la surface.


III. — LES VOIES DE COMMUNICATION.

Les Américains voyageant beaucoup, ils aiment à voyager vite ; les distances ne les effraient pas, et nombre de négocians font le trajet de la Californie aux états atlantiques une fois par an. Pour le faire promptement, on a ouvert trois passages interocéaniques, dont celui de l’isthme de Panama est encore le plus suivi, et l’on a rejoint chacune des extrémités de ces passages par des lignes de bateaux à vapeur. Ces lignes sont en relation avec New-York, La Havane, la Nouvelle-Orléans d’une part, Acapulco et San-Francisco de l’autre. De plus, il y a sur chacune des lignes un service subventionné par le gouvernement fédéral et un autre né de la concurrence ; ce dernier est souvent préférable malgré les charges énormes qu’il doit seul supporter.

On fait sur ces navires, en vingt ou vingt-deux jours seulement, le trajet