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que les diverses concessions qui relient ce port à Madrid se sont complétées après une suite de péripéties des plus bizarres. En 1851, le gouvernement, admettant des propositions qui lui furent faites, concédait la ligne de Séville à Cordoue telle qu’elle est à peu près exécutée aujourd’hui.

À vrai dire, les concessionnaires semblaient s’être beaucoup plus préoccupés de donner une raison sociale sonore à la compagnie que de l’affaire en elle-même. Il est certain que Séville et Cordoue sonnaient bien pour le public européen : ces deux noms dominèrent toute la situation. L’essentiel était de présenter des budgets de dépenses séduisans, par conséquent d’éviter les grands travaux ; aussi laissait-on de côté La Carlota, Écija, Carmona, Mayrena et Alcala de Guadaïra, toutes villes des plus importantes de l’Andalousie intérieure, pour aboutir à un tracé qui ne touche qu’à Lora del Rio et à quelques pauvres villages souvent dévorés par la fièvre. Le gouvernement laissa faire, et personne ne songea à protester, si bien que lorsque le Crédit mobilier rachetait plus tard une concession qui avait déjà subi de nombreuses vicissitudes, il se trouvait en face d’un fait accompli, et il ne lui restait qu’à exploiter convenablement la zone concédée, zone riche, il est vrai, mais bien moins intéressante que celle dont nous parlions.

Ce n’est qu’en 1856 que se forma la compagnie des chemins de fer de Séville à Cadix par Jerez. Rien ne semblait plus simple et plus logique que de prolonger la ligne de Cordoue vers Cadix, et c’est à cela que l’on tendait. Séville crut voir en cette concession presque un attentat à ses droits de navigation, car elle craignait de ne plus servir d’entrepôt et de voir son commerce décliner. Le Guadalquivir, que les navires remontent tous les jours plus difficilement, se verrait abandonné, disait-on, et dès lors plus de commerce. La députation sévillane obtint du moins que les deux stations resteraient séparées, que l’une serait établie à la Place d’armes, l’autre au Campo de Feria ; encore la concession de ces deux emplacemens fut-elle entourée de difficultés de tout genre. Ce n’est qu’en 1859 que la société du Crédit général espagnol, concessionnaire de la ligne de Cadix, put obtenir un emplacement qui l’éloignait de 3 kilomètres de la station du chemin de fer de Cordoue à Séville. Enfin on songea à relier les deux lignes : nouvelles jalousies et difficultés renaissantes ! On pouvait, en longeant le Guadalquivir et d’anciens fossés infects, qui eussent ainsi disparu avec un lambeau de murailles inutiles, aller s’embrancher directement. Cette idée fut repoussée ; Séville a toujours été jalouse de ses fossés et de ses murailles : c’est un vieil oripeau auquel elle tient. Après force discussions, en août 1860, on obtenait de contourner les murs pour aller se relier à quelques kilomètres de la ville. Voilà donc Cordoue