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plus sûrs, car depuis Mirabeau jusqu’à Royer-Collard nous y trouvons l’expression rayonnante et foudroyante de nos idées. On peut être confiant dans le succès quand on marche ainsi vers l’avenir appuyé sur les plus vigoureux représentans de la raison politique, dans l’ère où ils ont commencé et continué cette révolution française que les générations qui se succèdent devront poursuivre jusqu’à son achèvement. Si M. Billault eût, il y a douze ans, entendu un discours identique à celui qu’il vient de prononcer sur la liberté de la presse, qui doute qu’il n’eût protesté contre une telle harangue ? M. Billault a trop d’esprit pour ne pas prévoir que, si dans douze ans le discours qui vient d’enchanter la chambre lui revient en mémoire, ce discours lui paraîtra alors dépouillé de la vie et des couleurs de l’opportunité. Quant à nous, qui n’avons pas les charges du pouvoir, il nous suffit de regarder ainsi aux sanctions du passé et de l’avenir pour nous confirmer dans nos opinions présentes. Nous ne renonçons même point aux consolations du présent, car nous avons l’espoir que dans la prochaine session quelque pétition sérieuse mettra le sénat en mesure de consacrer à la liberté de la presse une de ces discussions approfondies en goût desquelles nous ont mis plusieurs délibérations sénatoriales de cette année, une de ces discussions par lesquelles les questions mûrissent et les solutions sont rapprochées.

Le discours de M. Jules Favre a été le dernier éclat de la session expirante. Des lois importantes ont été cependant votées dans les derniers jours ; mais ici s’est révélé un vice véritable dans la conduite et l’expédition des affaires législatives. Le gouvernement a entassé projets sur projets à une époque trop tardive, et le corps législatif, qui n’a eu rien à faire pendant les deux mois qui ont suivi la discussion de l’adresse, s’est vu en présence de travaux qui auraient suffi à remplir une session bien employée, lorsqu’il n’avait plus que deux semaines devant lui, et qu’il ne pouvait plus donner que des votes à peu près silencieux aux lois proposées. On aura une idée du défaut d’ensemble qu’ont présenté ces derniers travaux par le rapprochement suivant. Trois lois d’une portée sérieuse, et qui se reliaient entre elles par une étroite solidarité financière, ont été votées isolément, et sur les trois projets deux ont été votés sans discussion : nous voulons parler de la loi sur les obligations trentenaires, de la loi sur les nouveaux chemins de fer, de la loi sur les chemins de fer algériens. À ne prendre que la question financière engagée dans ces divers projets, cette question était très grave, et aurait dû être traitée à fond : elle n’a même pas été indiquée. Nous allons la signaler rapidement. Il ne s’agissait de rien moins pour l’état que d’entreprendre une dépense extraordinaire considérable, de pourvoir aux voies et moyens de cette dépense, et d’engager le crédit public dans la création d’un fonds nouveau.

L’état doit en subventions aux compagnies de chemins de fer des sommes importantes. Il reste redevable d’une part, pour subventions promises avant 1857, d’une somme de 69 millions, et d’autre part, pour subventions promises depuis cette époque, d’une somme de 104 millions. Ce n’est pas tout :