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gouvernement. C’est là, dit-il, la seule issue qui s’offre à lui pour résoudre cette difficulté. Toutefois il réclame encore à ce sujet l’avis de la commission[1]. »

En demandant encore l’avis de la commission, Fuad-Pacha me semblait dans cette séance du 2 mars abuser de son triomphe. Quel avis en effet demander à des gens qui ne peuvent pas s’entendre? Aussi la commission se hâta de conclure en disant qu’elle n’avait plus d’avis à donner.

Ne dissimulons rien. La commission s’était attiré cet échec par ses divisions; mais l’échec était grand, il l’était pour la commission, qui, chargée par l’Europe « de déterminer la part de responsabilité des chefs de l’insurrection et des agens de l’administration locale, » n’avait pas pu faire punir ceux qu’elle trouvait coupables presque unanimement, parce qu’elle n’avait pas pu avoir la même unanimité sur d’autres coupables. L’incertitude sur quelques-uns avait servi à l’impunité de presque tous. La commission, qui au commencement semblait exercer un pouvoir indépendant et européen, avait fini par se trouver impuissante et subordonnée. La décision lui échappait, et Fuad-Pacha la transportait habilement de Beyrouth à Constantinople. L’échec était grand aussi pour la justice, « car, comme le disait très bien le commissaire français, M. Béclard, dans la séance du 28 février, l’œuvre de la répression est complètement manquée. Nous avions devant nous trois catégories d’accusés, les fonctionnaire et officiers ottomans, les cheiks druses détenus à Beyrouth, les Druses de rang inférieur détenus à Mokhtarah. Si le procès des premiers est renvoyé à Constantinople, si la sentence des seconds est confirmée, mais non exécutée sur-le-champ, et si elle est soumise à une sorte de révision déguisée, si enfin la peine des Druses de Mokhtarah est commuée en masse, il n’y a plus aucune répression[2]. »


II.

Nous venons de voir l’échec de la commission internationale de Beyrouth dans sa mission extra-judiciaire : voyons si elle a eu meilleur succès dans la mission qu’elle avait reçue a d’apprécier l’étendue des désastres qui ont frappé les populations chrétiennes et de combiner les moyens propres k soulager et à indemniser les victimes[3]. » Cette œuvre d’humanité et de pitié méritait de réussir, et la commission internationale pouvait d’autant plus se flatter d’un succès sur ce point qu’elle était unanime, et qu’il n’y avait là aucune

  1. Documens anglais, p. 507, n° 375. Vingt-quatrième séance de la commission, 2 mars 1861.
  2. Ibid., p. 502, n° 395.
  3. Ibid., p. 169, n° 163.