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chemin faisant, a répandu sur celle de tout le moyen âge du Nord de nouvelles et abondantes lumières. Entraîné par les perspectives lointaines de son travail, qui s’étendaient sans cesse, il vient de passer un long temps à Rome, où nous savons qu’il a apporté, pour beaucoup de monumens écrits restés jusqu’à ce jour inexpliqués dans la bibliothèque du Vatican, des interprétations inattendues. M. P. A. Munch est un savant de premier ordre; mais il est systématique. Il s’est fait de l’histoire primitive des Norvégiens une conception où l’imagination risque d’avoir obtenu une trop grande part. Les contradictions n’ont fait que le confirmer dans ses vues, et elles influent aujourd’hui sur sa manière de considérer et d’apprécier les événemens qui se passent autour de lui : par exemple le scandinavisme, c’est-à-dire l’espérance d’une étroite union avec des droits égaux pour chacun des trois peuples du Nord, ne saurait lui sourire. — Hors deux ou trois études sur ce sujet brûlant du scandinavisme et un long travail sur les noms de personnes dans les langues scandinaves, ce n’est guère dans son recueil que nous pourrons trouver à nous instruire du Nord. Il est évident qu’il l’a destiné aux seuls Norvégiens, tout au plus aux lecteurs des trois royaumes. Nous avons lieu de croire que d’autres conditions donneraient au sérieux talent de M. Munch un meilleur essor.

M. Goldschmidt, qui a publié de même tout seul à Copenhague pendant quelques années un périodique in-18, intitulé Nord et Sud, auquel a succédé jusqu’à ces derniers temps le Hiemme og Ude, c’est-à-dire le Dedans et le Dehors, est moins exclusif en histoire, bien qu’il n’aime guère à se ranger du côté du plus grand nombre, et qu’il en ait donné des preuves en certaines occurrences. M. Goldschmidt est fort connu dans le Nord par plusieurs écrits remarquables. Il a publié deux romans; l’Homme sans foyer, Hjemlös, se réimprime en ce moment à la fois à Copenhague et à Londres, en danois et en anglais; l’autre, intitulé Un Juif, a obtenu, soit dans le Nord, soit en Angleterre, un assez grand succès. En outre M. Goldschmidt a rédigé pendant assez longtemps le Corsaire, journal satirique publié à Copenhague, qui lui a fait une grande réputation d’esprit. — Le Nord et Sud a plus que les périodiques que nous avons nommés jusqu’à présent le caractère d’actualité qu’on demande à de tels écrits. L’auteur y rend compte dans une sorte de chronique des plus récentes combinaisons de la politique. Pour donner à ses comptes-rendus de l’intérêt et de la vie, il n’épargne pas ses peines, et les affaires d’Italie par exemple lui ont fait successivement visiter Florence, Milan, Turin, où il s’est montré un habile et intelligent témoin des événemens. Quant aux affaires et à l’histoire de son propre pays, il les suit de près également dans le présent et dans le passé, et en même temps que son recueil soutient dans le cours de la lutte engagée entre le Danemark et l’Allemagne des opinions et des idées qui lui sont propres, il offre aussi des traductions intéressantes d’anciennes sagas où revit avec un puissant relief l’image d’un passé énergique et fécond. Le recueil de M. Goldschmidt se conforme d’ailleurs aussi peu que possible aux conditions matérielles que nous imposons d’ordinaire à tout périodique, et par cette capricieuse indépendance il mérite même à peine ce nom. Il paraît quand il plaît à M. Goldschmidt, qui doit seulement avoir fourni à ses abonnés au bout de la période