Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 34.djvu/922

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commencent à dépérir, arrive le tour des insectes xylophages, ou mangeurs de bois, qui, vivant dans l’intérieur même de l’arbre, n’avaient pu jusqu’alors, à cause du mouvement de la sève, s’installer dans le tissu ligneux. Ils achèvent l’œuvre de mort commencée par les premiers.

L’épicéa et le sapin, moins exposés que le pin aux ravages des chenilles, le sont davantage à ceux des xylophages. L’un de ces in- sectes, coléoptère de 2 millimètres de long, du genre bostriche, a mérité le nom de typographe à cause de la régularité des galeries qu’il creuse. Il commence par trouer l’écorce jusqu’au liber, et y pratique une chambre dans laquelle viennent s’accoupler un certain nombre d’individus. Chacune des femelles fécondées creuse aussitôt sa galerie particulière, où elle pond de vingt à cent œufs. A peine écloses, les jeunes larves ouvrent à leur tour de nouvelles galeries perpendiculaires à la première et vont se transformer en nymphes dans l’écorce. Bien que ces insectes séjournent de préférence dans les arbres languissans ou abattus, ils s’attaquent souvent aux plus vigoureux, et finissent par les faire succomber à leurs innombrables blessures.

Dans les forêts d’essences feuillues, l’insecte le plus à craindre est le hanneton. Les larves, connues aussi sous le nom de vers blancs, turcs, etc., sortent d’œufs déposés en terre; elles y passent trois années pendant lesquelles elles rongent les racines de toutes les plantes, n’épargnant pas plus les pépinières et les jeunes arbres des forêts que les blés et les fourrages. A l’état parfait, les hannetons ne sont pas moins nuisibles : ils se nourrissent de feuilles, les dévorent à mesure qu’elles poussent et n’en laissent parfois plus une seule sur les arbres décharnés. Ils sont si abondans dans certaines années qu’on a cherché à en tirer parti. On s’en sert comme engrais, on les donne en nourriture aux poules et aux bestiaux, on en fabrique de l’huile, du gaz, de la graisse à chariot, on en fait même une soupe fort savoureuse, dit-on, ayant quelque analogie avec celle d’écrevisse; mais il est douteux que ces différens services puissent jamais compenser le mal que font ces insectes aux productions de la terre. Les chenilles sont peu à redouter dans les forêts feuillues, quoique les lyparis, les bombyx processionnaires, les cossus-gâte-bois, y laissent cependant souvent des traces de leur passage.

La multiplication des insectes, surtout celle des chenilles, n’est pas constante, et s’opère parfois d’une manière irrégulière et par soubresauts. Il arrive souvent que pendant plusieurs années on aperçoit seulement quelques individus d’une même espèce, et qu’on se trouve un beau jour en présence d’une invasion formidable que rien