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UNE
INTERPRETATION PITTORESQUE
DE DANTE

L’ENFER de Dante, traduction de M. P.-A. Fiorentino, accompagnée du texte italien, avec les dessins de M. Gustave Doré[1].

Dante est une exception éclatante dans le monde des poètes par l’intérêt singulier qu’il sait inspirer aux intelligences les plus diverses et les plus contraires. Je sais bien que les poètes ne sont grands qu’à la condition d’être universels, mais les formules ordinaires par lesquelles la critique a coutume d’exprimer leur universalité sont vraiment incomplètes lorsqu’il s’agit de Dante. Ce n’est pas assez de dire pour lui ce qu’on dit de la plupart de ses frères en immortalité, qu’il est grand, parce que l’humanité reconnaît en lui ses passions et ses instincts, parce qu’elle se contemple en lui comme en un miroir, car il n’exprime pas seulement la vie instinctive et passionnée de l’âme, il exprime encore, — chose unique et qui ne s’est vue que cette seule fois, — la vie de l’intelligence dans ses modes les plus divers et dans ses activités les plus opposées. Il intéresse à la fois et cet homme moral auquel s’adressent tous ses frères en poésie, et cet homme intellectuel qui n’est pas identique comme l’homme moral, et qui varie non-seulement avec chaque catégorie de lecteurs, mais presque avec chaque lecteur pris isolément.

  1. 1 vol., Paris, Hachette.