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plus de gravité que dans toute autre. On ne peut, dans tous les cas, accuser ceux qui parlaient ainsi de dureté ou d’indifférence ; ils exagéraient au contraire le mal à guérir. « Il semblait, dit avec raison M. de Tocqueville, qu’on ne dût être entendu que de ceux qui étaient placés au-dessus du peuple, et que le seul danger qu’il y eût à craindre était de ne pas se faire bien comprendre de ceux-là. »

Le midi de la généralité avait éprouvé des pertes considérables par la grêle, l’épizootie et l’inondation ; l’évêque-président dit que les membres de l’assemblée s’empresseraient sans doute de porter secours à leurs concitoyens, qu’il ne croyait pas devoir proposer au tiers état de concourir à cette bonne œuvre, parce que ses charges étaient déjà trop considérables, mais qu’il était persuadé que le clergé et la noblesse s’empresseraient de donner en cette circonstance une preuve de leur générosité, qu’en conséquence il leur proposait, sous le bon plaisir du roi, de consacrer au soulagement des malheureux une somme de 30,000 livres, dont la moitié serait payée par le clergé et répartie sur les bénéficiers de la généralité, à l’exception des curés qui ne jouissaient pas de 1,000 livres de revenu, et l’autre moitié payée et répartie également au marc la livre sur les vingtièmes des nobles. « Le clergé et la noblesse, ajoute le procès-verbal, applaudissant à ces sentimens d’humanité et de bienfaisance, ont d’une voix unanime consenti à la proposition qui vient de leur être faite ; en conséquence, l’assemblée arrête de supplier le roi d’autoriser le clergé et la noblesse à s’imposer, pendant trois ans, la somme de 30,000 livres pour être employée au soulagement des plus pauvres contribuables. »

L’évêque qui donnait ce bel exemple n’en était pas à son début en fait de bienfaisance active et courageuse : quelques années auparavant, étant évêque de Bayonne, M. de La Ferronnays avait payé de sa personne avec un dévouement admirable, pendant un débordement de l’Adour, pour sauver les malheureux surpris par le fleuve ; ce qui fit dire à Louis XVI : « L’évêque de Bayonne va à l’eau comme ses frères vont au feu. » Il refusa le serment en 1791 et mourut dans l’émigration. C’est son neveu qui a été ministre et ambassadeur sous la restauration.

Cette assemblée s’occupa aussi du commerce et de l’industrie, mais il n’est pas dit un mot dans les procès-verbaux[1] du traité avec l’Angleterre. Il résulte seulement des faits présentés par le bureau du commerce que les manufactures souffraient des règlemens imaginés pour les protéger. On trouve dans son rapport des passages tels que celui-ci : « Plusieurs fabricans de Mortagne, négligeant

  1. 1 vol. in-4o imprimé à Lisieux.