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Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 38.djvu/563

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La forme de la constitution politique du pays a été d’abord fédéraliste; elle fut adoptée après le renversement d’Iturbide. On crut alors devoir prendre modèle sur les États-Unis, chez lesquels le système fédéraliste était tout spontanément sorti du sein même de la situation. Isolées les unes des autres avant l’indépendance, ayant non-seulement leurs gouvernemens distincts, mais aussi leurs chartes individuelles, et façonnées de longue main à s’administrer elles-mêmes, les treize ci-devant colonies de l’Angleterre sur le continent américain, lorsqu’elles se séparèrent de leur métropole, continuèrent ce mode d’existence en organisant entre elles les rapports strictement nécessaires par le moyen d’un simple congrès semblable à ces conférences où des puissances indépendantes se font représenter par des ambassadeurs. Plus tard, en 1787, elles ont modifié ce régime en y substituant deux assemblées délibérantes à la réunion desquelles on a conservé le nom de congrès, et en établissant un président muni de pouvoirs effectifs. Toutefois le principe de la souveraineté individuelle des états a été maintenu religieusement. Un pareil plan n’avait aucune racine dans le passé du Mexique. Les provinces diverses de la Nouvelle-Espagne n’avaient jamais eu le gouvernement d’elles-mêmes, et le pouvoir y était centralisé, condensé, absorbé tout entier entre les mains des représentans de la royauté espagnole à Mexico, sauf ce que s’en était réservé la royauté elle-même à Madrid. Le système fédéral fut aboli sous la première présidence du général Santa-Anna, en 1835, et remplacé par le système unitaire; mais le mouvement des partis et le débordement des passions locales et des ambitions personnelles le firent reparaître en 1846. Il succomba de nouveau sous le poids du malaise public en 1853, On l’a relevé en 1856, après la retraite de Santa-Anna. Depuis lors le pays est l’image du chaos. Il Il y a là une nation, un état, une société à refaire, de la base au sommet.

Qu’on me permette de transcrire ici des notes de voyages prises dans le port de la Vera-Cruz lorsque je visitai le pays; c’était quatorze ans après que l’indépendance avait été consommée. C’est un tableau qui donne une idée affaiblie de ce qu’est le Mexique aujourd’hui. «Ce port, si animé du temps des Espagnols, n’est plus qu’une solitude. Cinq ou six bâtimens, français, anglais ou américains, las d’y attendre les piastres qui ne descendent pas de Mexico, se disposent à aller charger du bois de teinture à Campêche. Entremêlés à ces navires, quelques goélettes servant au cabotage et quelques bateaux pêcheurs complètent la représentation du commerce de la Vera-Cruz. Le Robert Wilson pourrit à l’écart; la douane mexicaine, vigilante une fois, l’a confisqué à bon droit,