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L’exiguïté des cultures est généralement en raison directe de la densité de la population. Cette règle ne souffre pour ainsi dire pas d’exception. On peut la vérifier en comparant les différens cantons aussi bien que les différentes provinces. La raison s’en découvre facilement. La partie de la population croissante qui n’est pas absorbée par le travail de main-d’œuvre reste dans les campagnes et cherche à y vivre de la culture de la terre, soit en exploitant les parcelles des grandes fermes morcelées sous l’effet de l’intensité de la demande, soit en défrichant peu à peu les landes et les bois. De cette façon, les exploitations se divisent et se multiplient à mesure qu’augmente le nombre des habitans. L’Angleterre présente, il est vrai, un autre spectacle : là le surplus annuel de la population se concentre dans les villes, où l’appelle et l’entretient le développement progressif du commerce et de l’industrie, tandis que le nombre des habitans de la campagne reste à peu près stationnaire. Mais, en comparant les autres pays à l’Angleterre, il est un point qu’il ne faut jamais perdre de vue et qui doit mettre en garde contre les conclusions trop hâtives : c’est que l’Angleterre tout entière n’est, à vrai dire, que la métropole d’un vaste empire de 200 millions d’hommes répandus sur toute la surface du globe, lui expédiant des matières premières et recevant en échange des objets manufacturés. Il en résulte que la situation économique de la Grande-Bretagne ressemble à celle d’une grande cité commerciale et industrielle, et que ceux qui veulent tirer des faits observés dans ce pays exceptionnel des règles de tout point applicables ailleurs risquent fort de se tromper.

Relativement à la population totale, le nombre des propriétaires est moins grand en Belgique qu’en France, car sur 4 millions 1/2 d’habitans on n’y comptait en 1846 que 758,512 propriétaires, soit à peu près 1 propriétaire par 6 habitans et par 4 hectares de superficie totale, tandis qu’en France on trouve 1 propriétaire par 4,7 habitans et par 6,72 hectares de superficie. Le nombre des parcelles était de plus de 5 millions 1/2, et il augmente d’à peu près 30,000 par an pour les fonds bâtis et non bâtis. Si l’on considère le degré d’aisance de ceux qui se partagent la possession du sol, on constate que le tiers d’entre eux ont un revenu annuel effectif inférieur à 33 francs, et possèdent par conséquent moins de 1 hectare ; le second tiers, un revenu de 33 à 130 francs, et les