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thermale y sort de terre. Ces eaux sont aujourd’hui sans emploi ; mais du temps des Romains, peut-être même des l’époque étrusque, on les avait soigneusement captées, et des thermes existaient en ce lieu. Nous ne tardâmes pas en effet, vis-à-vis de la rade de Torre-Mozza, à passer devant une bâtisse de construction moderne qui renferme une mosaïque romaine. On dit que c’est le dernier grand-duc Léopold qui a forcé le propriétaire de ce terrain à prendre soin de cette œuvre d’art, le menaçant de la faire transporter à Florence, s’il ne la recouvrait pas dignement. Plût à Dieu que celle de Populonia se fût aussi trouvée sur le chemin du grand-duc dans son excursion à la Maremme !

Nous demandâmes à visiter la mosaïque, et la permission nous en fut gracieusement accordée. Cette mosaïque décore le parquet d’une salle de bain, et a seule été déblayée. L’ouvrage porte le cachet de l’époque romaine, et il n’y a pas lieu de penser qu’il puisse être attribué aux Étrusques.

À peine eûmes-nous quitté Torre-Mozza que nous entrâmes dans les maquis. La route est ouverte au milieu des bois, et c’est pendant l’été le rendez-vous des birbanti ou brigands, qui y détroussent à leur aise les rares voyageurs que leurs affaires amènent en ce lieu désert. L’été est la plus mauvaise saison pour la Maremme ; c’est celle où tout le monde fuit, effrayé par l’aria cattiva. Chacun demande alors à faire ce qu’on appelle en Toscane l’estatura, c’est-à-dire à prendre ses vacances, ou si l’on veut ses quartiers d’été. La sous-préfecture de Grosseto déménage, et le tribunal de cette ville emporte momentanément vers des lieux plus sains ses précieuses archives. Les gendarmes eux-mêmes désertent quelquefois leur poste, avec permission s’entend. Les casernes disposées le long de la route entre Torre-Mozza et Follonica sont alors ouvertes par les voleurs, qui y établissent tranquillement leur domicile ; ils attendent pour décamper et transporter ailleurs leur industrie que le mois d’octobre soit revenu, et qu’il ait ramené les gendarmes.

La partie du littoral de la Maremme que nous traversions est citée comme un des points les plus malsains de toute la Toscane, et l’étang de Follonica est pour les malheureux qui habitent dans le voisinage un véritable foyer de peste. De ce point, les marais du littoral se prolongent, mais sans continuité apparente, jusqu’à la limite sud du grand-duché, par Castiglion della Pescaia, Grosseto et Orbetello. Ils traversent ensuite les états de l’église des embouchures du Tibre aux Marais-Pontins, et s’étendent jusqu’à Terracine. Pour ne parler que de la Toscane, la surface qu’occupent ces marécages y est toujours très considérable malgré tous les travaux