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la totalité de la seconde émission de 100 millions de bons du trésor qu’il a sollicitée. À bien voir les choses, au lieu de prendre l’attitude d’un besoigneux pressé de faire argent de ce qu’il peut vendre, le gouvernement italien peut attendre, sans péril et au contraire avec grand profit pour son crédit, la session du mois de novembre, afin de donner aux discussions des lois relatives aux biens domaniaux et au crédit foncier le développement ample et réfléchi que réclament des débats de cette importance.

Il faut déplorer les derniers événemens des États-Unis : ils ne retardent pas seulement le triomphe d’une juste cause, ils jettent dans une lutte déjà si terrible de nouveaux et plus graves fermens d’irritation. Tous ceux qui en Europe encouragent le sud à une résistance désespérée vont directement contre les intérêts qu’ils ont à cœur : ils éloignent le moment où pourront se rétablir les prospères relations commerciales des États-Unis avec l’Europe ; ils se condamnent à la longue privation du coton américain et au pénible chômage du travail. De même tout avantage partiel obtenu par le sud prépare contre lui d’infaillibles et redoutables représailles. De ce que nous jugeons ainsi cette querelle, il ne s’ensuit pas que nous approuvions dans toutes ses parties la politique des États-Unis. Le gouvernement de Washington a commis sans doute bien des fautes. Ses erreurs dans la conduite des affaires militaires n’ont été que trop manifestées par le changement de position que le général Mac-Clellan a été obligé d’opérer avec tant de pertes devant l’armée de Richmond. Il était clair qu’en attaquant les confédérés sur tous les points de la circonférence où régnait l’insurrection, et en les refoulant, on les conduisait à une concentration de forces sur le point le plus important, Richmond. La plus simple prévoyance commandait de prodiguer les renforts au général qui aurait à supporter tout le poids des forces confédérées. Des rivalités, des jalousies se sont mises en travers des inspirations de la prudence ; mais même au milieu de ces fautes la cause du nord nous paraît digne de l’intérêt des libéraux du monde. Qu’on le remarque en effet, ces fautes sont l’accompagnement inévitable de l’état de liberté que les Américains du Nord maintiennent parmi eux, même pendant la guerre. C’est volontairement qu’ils subissent les inconvéniens de la liberté, tandis que leurs adversaires ont sur eux la supériorité que donnent le pouvoir dictatorial, le pouvoir révolutionnaire, le gouvernement par la terreur et par les supplices. Au surplus, l’échec de l’armée du Potomac ne décourage pas le gouvernement de Washington. Le général Pope lui promet la prompte reddition de Wiksburg. Le cabinet de M. Lincoln croit que dans un mois les armées fédérales entreront à Richmond ; il combine froidement et résolument ses préparatifs militaires et maritimes contre toutes les éventualités de l’avenir.

Chez nous, les questions de liberté ne s’agitent encore que sourdement ; mais, quelle que soit la scène où elles se présentent, c’est notre devoir de les signaler. Dans l’étroite enceinte scientifique où se dresse la chaire d’hébreu, c’est la cause de la liberté qui se présente avec M. Renan, traversé