parlemens contre le pape. Ses représentans aux conférences d’Abbeville étaient le chancelier Morvilliers, l’évêque La Balue et le patriarche de Jérusalem ; ils jetèrent les hauts cris quand les ambassadeurs bohémiens parlèrent d’annihiler le pouvoir politique du pape. On leur avait écrit non-seulement de Rome, mais de Prague, que le roi de Bohême était mis au ban de l’église, que ses envoyés étaient des hérétiques comme leur maître, et que ce serait une honte pour la France de s’allier à de tels mécréans. Il y eut des scènes presque violentes entre les trois conseillers de Louis XI et les deux Bohémiens. Il ne s’agissait même plus du parlement de rois, les conseillers juraient que toute alliance était impossible entre la France et la Bohême. Le roi pourtant fut d’un autre avis. Revenu dans Abbeville le 10 juillet, il emmena les ambassadeurs à Dieppe, puis à trois lieues du port, dans le petit château de Neuville. Là il fut décidé que Louis XI enverrait une ambassade à Prague après les fêtes de la Toussaint ; Albert Kostka reçut le titre de conseiller du roi de France, et un traité d’alliance fut conclu entre les deux pays : dans les termes mêmes que désiraient les ambassadeurs. Comme les évêques essayaient encore de s’y opposer : « Que cela vous fasse plaisir ou non, dit Louis XI, je veux être l’ami du roi de Bohême. » Ce traité, dont le texte original est aux archives de Vienne, porté que les deux rois, pour le bien et l’honneur des deux royaumes, de la sainte église et de toute la chrétienté, veulent être frères, amis, alliés, dans tous les temps à venir. » Il n’y est pas dit un mot de ce parlement des souverains de l’Europe qui était le principal objet de l’ambassade.
« Ce n’était pourtant pas, s’écrie M. Palacky, une chimérique pensée pour l’époque, comme on serait tenté de le croire aujourd’hui. Les dernières assemblées générales de l’église, les conciles de Bâle et de Constance, avaient été des foyers de vie et d’action, non-seulement pour les choses religieuses, mais pour les intérêts politiques des nations chrétiennes. Pie II lui-même, en convoquant l’assemblée de Mantoue afin d’armer l’Europe contre les Turcs, avait montré combien ces délibérations solennelles étaient conformes à l’esprit public et aux nécessités du temps. Le XVe siècle est le premier qui ait vu naître ces congrès internationaux, étouffés et rendus impossibles par les déchiremens de la période suivante. Si le projet du roi George avait triomphé, l’histoire de l’Europe aurait pris une direction plus humaine ; mais il fallait pour cela un Henri IV sur le trône de France, et non pas un Louis XI. Les plus vivantes idées sont frappées de paralysie quand elles viennent se heurter contre l’égoïsme. » Noble langage assurément, et très vrai dans ce qu’il a de général ; appliqué à Louis XI, il est inexact et injuste. Louis XI n’était pas libre d’agir comme Henri IV. Qu’était-ce que ce parlement