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Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 42.djvu/14

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du palais de Kensington. On peut, par exemple, y étudier la constitution du territoire des différentes régions du globe par les échantillons géologiques et minéralogiques, méthodiquement classés, qui ont été apportés des différentes parties de la terre. Oh a la faculté, dans cette pérégrination, de s’assister de bonnes cartes de géographie, d’excellentes mappemondes, même de globes où la terre est représentée dans sa rotondité, car tout cela y est étalé. On a encore pour quelques contrées, surtout pour quelques-unes de celles que nous ignorons le plus en Europe, l’assistance de paysages joliment dessinés et peints. C’est ainsi qu’on s’arrête avec un vif intérêt devant une suite de vues de l’Australie.

Je n’exagère pas le mérite de l’exposition en disant que c’est un champ d’observations pour le philosophe, pour l’historien, pour l’homme d’état. On y trouve en effet des indications précises, positives, flagrantes, sur la situation des différens peuples, leurs usages, leurs mœurs, leur avancement dans les sciences et les beaux-arts, leur degré de richesse, la densité de leur population. De même que le physiologiste ou l’homme versé dans l’anatomie comparée arrive, par le moyen d’un seul ossement d’un des animaux antédiluviens, à en déterminer la constitution, de même, et à plus forte raison, il est possible de faire la description d’une société et de déterminer les traits et les caractères de sa civilisation quand on a sous les yeux tout ou presque tout ce qu’elle sait faire, quand on peut voir et toucher ses ustensiles, ses meubles, ses vêtemens, examiner les ornemens dont elle aime à se parer et goûter des yeux au moins aux alimens dont elle délecte son palais.

Il est un autre sujet sur lequel l’exposition ouvre des perspectives étendues, plus riches sans doute d’espoir que de réalité, mais dont l’intérêt est infini. En m’exprimant ainsi, je ne fais pas allusion seulement aux machines nouvelles, d’un genre ignoré jusqu’à notre époque, qui viennent de naître, et dont il est impossible encore de prévoir le dernier mot. Je n’ai pas en vue non plus, quelques promesses qu’ils fassent, les corps nouveaux que l’homme a pour ainsi dire créés en les extrayant du sein de substances dans lesquelles ils étaient engagés au point qu’il semblait impossible non pas seulement de les y voir, mais de les y soupçonner. Ce que je voudrais signaler de préférence, ce sont ces matières brutes que la nature nous présente disséminées dans des climats lointains, matières que nous connaissons à peine et dont nous n’avons tiré qu’un parti insignifiant encore, mais dont il y a lieu de penser que l’industrie humaine fera profiter la société sur de grandes proportions à cause des qualités originales qui leur sont propres, voyez le caoutchouc : c’est un suc grossièrement recueilli par des peuplades sauvages ou à demi civilisées, et qui, se coagulant à l’air, se change en