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gane de la diète contre les élémens disparates qui s’introduisaient dans le corps germanique en en troublant l’harmonie, et il obtenait satisfaction. Spectacle singulier, ce fut l’homme qui, en 1815, avait le plus contribué à organiser l’Allemagne en une « fédération d’états » au lieu d’un « état fédéré, » ce fut le même homme qui parlait dans la suite avec le plus de zèle au nom de la centralisation et de l’unité, indispensables dans la direction des affaires générales. Dans un curieux entretien noté fidèlement et transmis à la postérité par M. Varnhagen von Ense, le célèbre diplomate autrichien avait un jour fortement invectivé les « doctrinaires, » et fini sa sortie par la déclaration que, quant à lui, il n’avait jamais été «homme de doctrine, mais de principe. » Nous nous sommes plus d’une fois demandé avec perplexité de quel principe M. de Metternich prétendait être l’homme. La définition qu’il donnait dans le même entretien de son système, et qui consistait à «maintenir tout ce qui a pu être sauvé du passé pour y retourner complètement, s’il était possible,» n’est point évidemment un principe, pas même une «doctrine,» mais tout simplement un expédient. M. de Metternich aurait-il été par hasard l’homme du principe de l’unité, — de l’unité allemande aussi bien qu’italienne? car on se rappelle que son procédé dans les affaires de la péninsule était le même que dans celles de la confédération germanique, et que, tout en déclarant l’Italie une «expression géographique, » il n’en travaillait pas moins à rendre uniforme le régime qui gouvernait ses divers états! Étrange surprise que nous ménagerait dans tous les cas une histoire bien approfondie de notre siècle, si elle arrivait à découvrir dans M. de Metternich un précurseur et un ancêtre de M. de Cavour et de M. de Gagern!... Mais non, cela aussi ne fut qu’un expédient dont le cabinet de Vienne n’avait pas même gardé le monopole à lui seul. La Prusse aussi bien que l’Autriche, la Bavière aussi bien que le Wurtemberg ou la Saxe parlèrent plus d’une fois et tour à tour tantôt au nom de l’unité de la confédération, tantôt au nom de l’indépendance des divers états, selon l’intérêt égoïste du moment et les besoins de l’argumentation.

On ne saurait rendre assez hommage aux libéraux du sud de l’Allemagne, notamment à ceux de Bade, pour la fermeté et la persévérance qu’ils mirent à défendre, pendant cette longue période de 1815 à 1840, les principes modernes, — luttant contre des obstacles sans nombre, luttant même contre l’indifférence générale, car, il faut bien le dire, l’Allemagne ne se désintéressa que trop tôt, et à tort, de ces combats toujours stériles, livrés dans des champs clos très étroits, et dont le bruit du reste ne lui arrivait que de loin, notablement assourdi par chacune des polices locales. Découragée, dégoûtée, ayant perdu la plupart des meneurs ardens de sa jeunesse qui peuplaient la terre étrangère ou les prisons, la nation revint à