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établissement de bienfaisance, tandis que le comité qui le dirigeait s’est constitué en comité de secours pour le quartier de Hulme, et même étend son action au-delà. Les comités, celui de Hulme, le Provident Society et les autres, distribuent les secours en partie dans leurs bureaux mêmes, et en partie par l’intermédiaire des écoles qui sont sous leur dépendance.

Je parlerai d’abord du premier mode de distribution, celui qui s’opère directement dans les bureaux, parce qu’il a naturellement été adopté le premier dans un moment pressant, tandis que le système des écoles, bien préférable en général, ne pouvait se développer que plus lentement. Toutes les demandes adressées au comité, soit directement par les ouvriers, soit par l’entremise de leurs patrons, sont confiées aux visiteurs dont j’ai tout à l’heure expliqué le rôle. Les visiteurs se rendent chez les pauvres pour s’enquérir de leur situation, et vont en même temps à la découverte de ceux qui, malgré leur misère, répugnent encore à l’avouer. Les rapports qu’ils remettent tous les jours au comité, recommandant les familles qu’ils ont visitées, indiquent le nombre de personnes que comprend chacune d’elles, les salaires qu’elles gagnaient in full time, le chiffre de leur loyer, les secours qu’elles ont déjà reçus, la manière dont elles doivent être secourues, et les besoins les plus pressans auxquels il faut pourvoir.

Munis d’un billet que le visiteur leur a remis, les pauvres se présentent au bureau ouvert depuis le matin jusque fort avant dans la nuit. Là on les examine. C’est en m’asseyant à côté de l’un des employés dans ces salles basses et encombrées, en assistant à l’examen des femmes, des enfans, des hommes valides réunis par une même misère, qui s’y pressent à toute heure, que j’ai commencé à me faire une idée de la situation des ouvriers et de l’étendue de leur détresse. Cet examen est une tâche difficile, où il faut joindre à des sentimens charitables du tact et malheureusement aussi quelquefois le courage du refus. Il s’agit en effet, non pas seulement d’éviter les tromperies, de s’assurer que les pauvres ne dépassent point leur quote-part en recevant de plusieurs côtés et de ne secourir que ceux qui le méritent, mais surtout, parmi ceux-là mêmes, de distinguer ceux auxquels l’intention des souscripteurs destine les fonds dont dispose le comité. De tout temps la misère a existé dans les grandes villes; mais cette misère ordinaire a toujours été et doit rester à la charge de la taxe des pauvres, instituée à cet effet. Il y a une limite délicate à établir entre les pauvres chroniques, comme disent les Anglais, et ceux qui souffrent directement ou indirectement de la crise du coton, et les comités chargés de tracer cette limite ont souvent à remplir un pénible devoir. La mesure dans les secours n’est pas moins difficile à garder en présence de tant de