un seul homme qui n’eût point été rangé à une certaine heure du passé dans ces diverses catégories d’opinion ? À ce compte, le parti du gouvernement n’est pas une coalition moins flagrante que le parti de l’opposition. Nous demandons si depuis 1852 jusqu’à ce jour il eût été possible au gouvernement de recruter son administration, de remplir le sénat, le conseil d’état et le corps législatif, de composer l’état-major de l’armée, de former même un conseil des ministres, sans choisir des hommes qui eussent été à leur date ou légitimistes, ou orléanistes, ou républicains. Que la presse officieuse soit moins fière ! En fait de coalition, son parti n’a rien à envier au parti libéral. Son parti compte dans ses rangs autant d’anciens jacobins et d’anciens socialistes que le nôtre. Ces esprits immobiles, que M. de Lamartine appela un jour des conservateurs-bornes, y pullulent bien plus que parmi nous. Par quelle comique injustice le mot de coalition avec le sens fâcheux qu’on y attache s’appliquerait-il à la rencontre d’opinions désintéressées réunies autour du principe de la liberté, lorsqu’il serait épargné à ces utiles rapprochemens de personnes qui s’accomplissent sous la séduisante et rémunératrice influence du pouvoir ?
Quant aux coalitions véritables, qui ne sont que les manœuvres d’une tactique plus ou moins habile, où l’ambition fait bon marché des principes, elles nous inspirent une répugnance profonde, et nous croyons qu’on ne saurait trop ménager les scrupules que la conscience publique ressent à cet endroit. Il faut, suivant nous, en éviter l’apparence même, et c’est dans cette pensée que nous n’avons pas craint de montrer, quoi qu’il en pût coûter à nos sentimens personnels, le peu de goût que nous aurions à voir des hommes considérables, que l’opinion ne peut séparer des rôles éminens qu’ils ont remplis en des camps divers, paraître se réunir pour exercer dans le mouvement électoral actuel une action prépondérante sur l’opposition ; mais que nos conseils de prudence à cet égard soient écoutés ou négligés, il est certain qu’il ne peut être question de coalition dans les circonstances présentes. La situation actuelle ne comporte pas des coalitions ; elle suscite et légitime la formation d’un grand parti démocratique et libéral qui n’a point à demander à ses membres leurs passeports d’origine. Ce parti ne saurait avoir encore de chefs ; tous les plus illustres vétérans eux-mêmes, n’y peuvent servir qu’en volontaires. Ce parti ne peut être que constitutionnel, puisqu’il ne peut exister qu’à la condition d’entrer et d’agir dans le cercle de la constitution. Ce sont les situations qui font les partis, et, en changeant elles-mêmes, elles les modifient et les transforment. Le parti libéral qui se forme spontanément dans le pays, et en dehors duquel il ne pourra plus rester que de rares rêveurs et de hargneux sectaires, rend à la constitution ce premier hommage de croire qu’elle n’est point incompatible avec la liberté et qu’elle est perfectible. Les élections prochaines sont pour lui une occasion de mettre sa foi à l’épreuve. Les partis en. ce moment ne peuvent se classer, les élections ne peuvent se faire que sur la question intérieure. La question intérieure par