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LE
MATÉRIALISME CONTEMPORAIN

une théorie anglaise sur les causes finales


Il est une disposition qui tend à dominer dans les sciences, et dont le matérialisme contemporain ne manque pas de se prévaloir[1] : c’est l’aversion non déguisée des savans pour les causes finales et pour tout ce qui y ressemble. Je ne m’explique pas bien, je l’avoue, cette aversion. En quoi donc l’hypothèse d’un plan et d’un dessein dans la nature (car c’est en cela que consiste la doctrine des causes finales) est-elle contraire à l’esprit scientifique ? Il faut distinguer soigneusement ici deux ordres d’idées : la méthode et le fond des choses. La méthode des causes finales peut être stérile et nuisible dans la science, sans qu’il en résulte pour cela qu’il n’y ait point de causes finales dans la réalité. Sans doute, si nous commençons par supposer que tel phénomène a un but et un certain but, nous pouvons être entraînés par là, pour mettre les choses d’accord avec ce but imaginaire, à supprimer des faits réels et à en introduire de chimériques : il ne faut donc point partir de cette idée préconçue, et que l’expérience pourrait démentir ; mais si c’est là une mauvaise méthode pour découvrir les faits (et cela même est-il vrai sans restriction ?), s’ensuit-il que les faits, une fois découverts, ne révéleront pas des convenances, un plan, une inten-

  1. Voyez une première étude sur le Matérialisme contemporain dans la Revue du 15 août dernier.