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LES LOIS
ET
LES MOEURS ELECTORALES EN FRANCE

« Nous assistons au retour de beaucoup de choses qu’on croyait impossibles. » Ces paroles, que l’empereur Napoléon III disait un jour, sont bien justifiées par les dernières élections du corps législatif. Depuis onze ans, la France avait une constitution dont elle paraissait peu disposée à se servir : cette constitution laissait aux électeurs le droit de choisir leurs députés; mais ils s’en étaient désintéressés, et la législation électorale, telle qu’elle était appliquée, paraissait destinée à les entretenir dans cette indifférence. De 1852 à 1863, les lois qui avaient discipliné le suffrage universel n’ont point été changées, et les procédés employés pour diriger les élections ont été en quelque sorte perfectionnés. Quoi qu’il en soit, malgré ces obstacles soigneusement multipliés, en dépit de toutes les mesures qui assuraient presque partout d’un côté la victoire, de l’autre la défaite, la lutte, si peu égale qu’elle fût, n’a découragé ni les candidats ni les électeurs, et, quel qu’en soit le résultat, elle a tourné à l’avantage de ceux qui l’avaient entreprise. Elle a montré, il est vrai, un gouvernement armé de toutes pièces, triomphant le plus souvent et sans trop de peine; mais elle a pour la première fois appris que le succès pouvait lui être disputé. Les candidats du gouvernement ont beau être pour la plupart les députés élus; est-ce suffisant? Ainsi que le proclamait l’un de ceux qui se donnent comme les interprètes de la politique officielle, la majorité dont le pouvoir a besoin est « une majorité sans fantaisie. » Pour obtenir une telle majorité, il a fallu s’assurer des électeurs non moins dociles,