Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 48.djvu/986

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de Vienne. On reproche ici à M. de Rechberg de s’être associé au ministère prussien, et l’on se montre assez peu ardent d’ailleurs pour une agitation qui profiterait surtout au parti national et démocratique, c’est-à-dire à l’Allemagne du nord. La situation de M. de Bismark paraît plus difficile encore. Faut-il croire qu’à la cour de Berlin une influence suprême ait voulu à tout prix soutenir le prétendant à la suite d’une quasi-promesse de vassalité, et que le premier ministre, avant de pouvoir reconnaître nettement, de concert avec la cour de Vienne, les obligations du traité de Londres, ait presque dû offrir sa démission, pendant que la chambre des députés luttait auprès du roi en faveur du duc d’Augustenbourg ? Ce qui est sûr, c’est que, par certains côtés du moins, comme diversion au débat parlementaire, comme solution de la question militaire depuis si longtemps pendante, la question des duchés, renaissant avec une telle ardeur, a dû plaire à cette cour, et c’est précisément sur cette pente funeste que nous craignons de voir les complications actuelles se précipiter vers la guerre.

Le Danemark de son côté vient de faire une concession nouvelle en abolissant, il y a quelques jours, les ordonnances du 30 mars concernant l’administration intérieure du Holstein. Par cette mesure, il a enlevé tout prétexte à l’exécution allemande, puisqu’il a fait table rase. Une récente proclamation de Christian IX annonce de nouvelles libertés aux Holsteinois. Si la population pouvait prendre le dessus et se débarrasser des influences seigneuriales qui la dominent, tout serait bien vite concilié entre un gouvernement qui offre autant de libertés qu’on en peut vouloir et des peuples qui, livrés à eux-mêmes, n’auraient aucune raison pour refuser de telles offres. Demandera-t-on encore au Danemark d’abolir la constitution du 18 novembre dernier, destinée à régler les affaires communes entre le Danemark propre et le duché de Slesvig ? En vérité nous ne savons si la nation danoise y consentira jamais, quand même son gouvernement serait de cet avis. Aujourd’hui l’union est complète entre le Danemark et son nouveau roi ; Christian IX, en acceptant la constitution du 18 novembre dès les premiers jours de son avènement, a mérité les applaudissemens et la confiance de son peuple ; mais le souvenir de cet acte récent et solennel exige aussi que la nouvelle charte ne soit pas mise en question. Si le Danemark croit devoir faire encore cette concession, nous craindrons pour lui une série désormais illimitée de mécomptes, comme nous craignions hier une attaque violente et imméritée : nous voulons espérer que l’abolition des ordonnances du 30 mars suffira pour faire retarder l’exécution fédérale et ajourner la lutte.

Une fois encore l’Europe se tourne vers les grandes puissances