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pour invoquer leur autorité médiatrice. Les envoyés extraordinaires chargés de complimenter le nouveau roi à l’occasion de son avènement vont se trouver réunis à Copenhague. Leurs instructions leur permettront-elles d’intervenir avec fruit ? On paraît croire en Allemagne qu’ils multiplieront les conseils de prudence, mais sans que leurs gouvernemens, fort peu décidés à une action commune, veuillent reconnaître encore la question comme européenne. Il faudra cependant un jour ou l’autre consentir à voir dans le germe le fruit à venir. Le rétablissement de la paix entre le Danemark et l’Allemagne, l’arrangement simultané des deux questions soulevées aujourd’hui ne seront possibles qu’à une seule condition : c’est que l’Allemagne renonce à se mêler des affaires du Slesvig, et n’est-ce pas là une affaire absolument européenne ? Le débat se réduit, à vrai dire, bien que l’Allemagne ne veuille pas l’avouer, à ce seul point. Il ne s’agit pas de M. le duc d’Augustenbourg, à qui peu de gens en réalité s’intéressent ; il s’agit du Slesvig, que l’Allemagne veut toujours attirer à elle, et que le Danemark ne peut laisser écarter de lui sans signer sa propre déchéance. Or sait-on bien que le seul document sur lequel on s’appuie est en dernière analyse la charte du 6 mars 1460, qui affirme l’inséparable union du Slesvig avec le Holstein ? N’est-elle donc pas enfin déchirée, cette capitulation du XVe siècle, par les actes solennels de 1720, par les renonciations diverses de tant de prétendans, et n’est-il pas ridicule que, si près, de nous, des discussions de droit purement féodal, de droit du XVe siècle, cent fois mises à néant, mais renaissant encore et se mêlant d’une façon bizarre aux passions démocratiques de notre temps, viennent en plein XIXe siècle menacer sérieusement notre sécurité ?


A. Geffroy.