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L'ÉGLISE ET L'ÉTAT

L’Église et la Révolution française, histoire de l’Église et de l’État de 1789 à 1802, par M. Edmond de Pressensé, Paris, 1864.

Si quelque chose prouve bien que l’homme est un être essentiellement sociable, ou, comme disait Aristote un animal politique, c’est qu’il ait fait de la religion, presque en tout temps et en tout pays, une des institutions de la communauté. Considérée en elle-même, dans ce qu’elle a de fondamental et de sain, la religion semble une chose purement individuelle. Le sentiment de la piété, les idées qu’il suppose, les devoirs qu’il prescrit, tous les rapports en un mot de l’homme avec son auteur sont dans le cœur et dans la pensée, et appartiennent par conséquent, comme Dieu même, à la sphère de l’invisible. Rien là ne peut prendre une forme qui soit dans une parfaite harmonie avec la nature de ce qu’elle exprime. Toute forme est sensible, matérielle, et la religion n’est rien de semblable ; elle ne peut être conçue ni pratiquée dignement qu’en esprit et en vérité. Si la société n’était naturelle et nécessaire à l’homme, il renfermerait donc en lui-même tout ce qu’il saurait, tout ce qu’il pourrait concevoir de ses relations avec la Divinité ; il est vrai qu’il n’en concevrait alors, qu’il n’en saurait qu’infiniment peu de chose, et sa raison, en cela comme en tout le reste, doit une grande part de sa valeur, à la faculté d’être communicable. C’est parce qu’elle a le don de s’exprimer qu’elle se propage, et pour se propager elle se déploie ; la tradition est l’auxiliaire nécessaire de la réflexion, et qui sait si l’on découvrirait beaucoup de vérité sans la nécessité et l’espoir de les faire connaître ? Mais quelque penchant