Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 53.djvu/460

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fer oligiste. Ce sont les minéralogistes grecs qui ont donné à ce minerai le nom qu’il porte, et qui le dépeint si bien. « L’hématite ou pierre de sang, dit Théophraste dans son Traité des pierres, est d’une texture serrée et solide ; elle est sèche et semble, comme le mot l’indique, être formée de sang pétrifié. »

L’oligiste et l’hématite dominent à l’île d’Elbe. Quelquefois les échantillons contiennent du manganèse, ce qui bonifie singulièrement la qualité du fer. L’aspect du minerai est alors plus noirâtre. À Rio-Albano, mais surtout à Calamita, c’est-à-dire sur l’une et l’autre extrémité des gisemens considérés dans leur ensemble, le fer oxydulé magnétique, vulgairement pierre d’aimant, entre pour une forte proportion. Chimiquement, le fer oxydulé contient la même quantité de fer que l’oligiste cristallisé. Il a un grain très serré, une couleur grise un peu terne, rappelant celle de l’acier dépoli. Certains échantillons ressemblent à de véritables morceaux de ce métal ; plus durs même que l’acier trempé, ils raient jusqu’au cristal de roche. Ils agissent d’une façon remarquable sur la boussole, et jouissent comme elle de deux pôles, attirant un côté de l’aiguille, repoussant l’autre. C’est toujours la même pierre que le sage Thalès, six siècles avant Jésus-Christ, étudiait avec tant de curiosité dans les mines de la Magnésie, d’où elle a pris son nom grec de μάγνης. C’est encore elle qui, sous le nom de calamité, servait dès le XIe siècle de notre ère aux marins de la Méditerranée pour se diriger sur la mer, quand l’étoile polaire faisait défaut. Un morceau d’aimant naturel, porté sur un rondin de liège et flottant librement dans un vase, fut jusqu’à Colomb le seul compas du navigateur. Il est probable que si les Grecs restèrent fidèles à la Magnésie pour la fabrication de leurs boussoles, les Italiens et les Provençaux se fournirent à Calamita. Les mineurs de la Toscane eux-mêmes, qui dès le Xe siècle fouillèrent les riches filons de cuivre et d’argent de Montieri et de Massa-Marittima, employaient la calamité pour s’orienter dans leurs galeries souterraines.

Le fer oxydulé magnétique porte toujours en italien le nom de calamita, qu’il jouisse ou non de deux pôles. La poussière qu’il donne est noire ; celle de l’oligiste et de l’hématite est rouge. Quand l’hématite est hydratée, alors la poussière en est jaune. Ces signes, bien simples à reconnaître, sont caractéristiques de ces trois principales qualités de minerais. Le fer oxydulé y joint ses propriétés magnétiques.

Les grenats, l’amphibole, l’ilvaïte, silicates contenant tous une forte proportion de fer, accompagnent le gisement de la calamité. On retrouve aussi ces deux derniers minéraux (l’amphibole et l’ilvaïte) à Rio, où l’ilvaïte forme même des faisceaux de cristaux très remarquables. Le nom de ce minéral rappelle celui de l’île ; c’est là