Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 53.djvu/464

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Léopold emprunta 12 millions de lires toscanes (environ 10 millions de francs) à la maison de banque Bastogi, et donna hypothèque sur les mines de l’île d’Elbe. Ce gage servit à garantir l’intérêt à 5 pour 100 de l’emprunt. MM. Bastogi furent même investis de la direction des mines et des fonderies grand-ducales, et sous le nom d’amministrazione cointeressata une nouvelle administration fonctionna à l’île d’Elbe et à Follonica sous la surveillance du gouvernement toscan. Le roi d’Italie, respectant les contrats onéreux de Léopold, a maintenu cet état de choses, qui doit durer encore dix-sept ans. En cette occurrence, qui fera les améliorations indiquées tant pour les mines que pour les usines ? Sera-ce le gouvernement italien ? sera-ce la compagnie Bastogi ? Le seul moyen de sortir d’embarras, ce serait de convoquer tous les actionnaires qui ont souscrit à l’emprunt grand-ducal, de leur garantir le montant et l’intérêt de leurs titres, puis de les exproprier, pour cause d’utilité publique, de l’hypothèque sur les mines et les fonderies, et surtout de la direction des travaux. On vendrait alors les mines et les trois usines soit à l’encan, soit à des compagnies d’industriels qu’on appellerait à soumissionner. Les amateurs ne manqueraient pas, l’état réaliserait plusieurs millions dans cette affaire et y trouverait sa tranquillité : il affranchirait du même coup les propriétaires fonciers de l’île d’Elbe de la servitude qui pèse sur eux, et ceux dont le sol ne serait pas déjà occupé seraient libres d’exploiter eux-mêmes leurs mines ou de les vendre à la compagnie industrielle substituée aux droits de l’état ; mais où sont la plupart des actionnaires de l’emprunt de 1851 ? Les titres sont au porteur, et l’on dit que l’ex-grand-duc, sa famille et ses fidèles en possèdent une grande partie. Sorti de son duché pour la seconde fois en 1859, Léopold ne serait certainement pas en humeur d’aider le roi d’Italie dans l’accomplissement d’une mesure devenue si urgente.

Cependant il est triste, pour la péninsule, qui cherche à se constituer, qui s’arme pour sa défense et complète le réseau de ses lignes ferrées, d’être obligée de commander ailleurs des monitors, des frégates blindées, des canons rayés, des rails et des locomotives, voire des machines à vapeur. C’est avec le fer provenant du minerai de l’île d’Elbe que les constructeurs de France et d’Angleterre satisfont souvent aux demandes de l’Italie, et tout récemment un entrepreneur de chemins de fer de la péninsule, ayant eu besoin de 12,000 tonnes de rails, s’est adressé à des établissemens français qui traitent justement le minerai de l’île d’Elbe.

Aujourd’hui, dans ce golfe de la Spezzia, où la nature a creusé le plus beau port de la Méditerranée, s’installent des chantiers de construction maritime. On dit que c’est une compagnie française qui les établit. Que l’Italie au moins élève des hauts-fourneaux capables