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gara, sur le territoire canadien, par d’actifs pourparlers entre les délégués des confédérés et les délégués du parti démocrate. Est-on arrivé dans ces conférences à une entente bien réelle et bien précise sur les bases d’une pacification future ? C’est peu probable ; mais ces conférences donnent du moins à penser au public que les chances de paix seraient meilleures avec un président démocrate qu’avec M. Lincoln. De même, dans la convention de Chicago, les délégués n’ont été nets que dans leur opposition contre M. Lincoln et le parti républicain ; mais ils ne se sont pas réellement entendus sur le programme d’une politique positive. Tous leurs efforts se sont nettement concentrés sur l’union des votes ; ils ont systématiquement laissé dans l’ombre l’union impossible des idées. Le parti qui a réuni sa convention à Chicago porte sa contradiction dans son sein, puisqu’il se partage en démocrates de la guerre et en démocrates de la paix. Oublions ces divisions, ont dit à l’envi les délégués les plus influons, né parlons ni de war-democrats ni de peace-democrats, unissons-nous pour renverser du pouvoir des hommes qui n’y sont arrivés que grâce à nos anciennes divisions. La contradiction est restée néanmoins dans leur plateforme, puisqu’ils y demandent à la fois et la paix et le rétablissement de l’union, deux choses que M. Jefferson Davis et les confédérés n’ont guère l’air de regarder comme conciliables. La contradiction existe même dans la personne de leur candidat. N’est-il pas curieux que pour le représentant d’une politique pacifique on choisisse un général ? Et ce général, qui en politique et à la guerre a fait preuve d’indécision de caractère et d’irrésolution d’esprit, est celui qui a commandé les deux premières campagnes de l’Union dans ce gigantesque conflit ! En dépit ou plutôt en raison de ces contradictions s’accroissent les chances de la candidature de Mac-Clellan et du parti qui la soutient. Le grand fait, c’est que cette fois le parti démocrate est uni dans le vote, et cette union est une grande force auprès de ceux qui, en Amérique comme ailleurs, indifférons aux principes, ne tiennent qu’à se faire d’avance une bonne place dans le parti du succès.

Il s’en faut cependant que le parti républicain et son candidat naturel, M. Lincoln, doivent déjà désespérer de la victoire. L’éclat et le retentissement de la manifestation de Chicago ne manqueront pas de réveiller l’énergie du parti républicain. Ce parti est en face d’un adversaire trop sérieux pour que ses diverses fractions puissent s’abandonner à leurs fantaisies et négliger la concentration de leurs forces. Déjà l’on annonce que le général Fremont, qui voulait combattre M. Lincoln, renonce à sa candidature. Quelques fautes qu’il ait pu commettre en exerçant le pouvoir dans une crise sans exemple et dans une guerre qui s’étend sur le plus vaste échiquier où les peuples se soient jamais combattus, le parti républicain n’en demeure pas moins le parti des intérêts et des principes de la civilisation moderne dans l’Amérique du Nord ; c’est le parti qui veut purger l’Amérique de l’esclavage, qui représente la grandeur du patriotisme amé-