Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 53.djvu/642

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tion polonaise, pour être beaucoup plus réservée et circonspecte que la conduite de son administration en Galicie, n’en semblait pas moins marquée également au coin d’un esprit qui pouvait paraître nouveau et peu conforme aux traditions ordinaires du cabinet de Vienne. L’Autriche avait refusé d’entrer dans la convention russo-prussienne, et si elle avait ensuite également décliné toute participation dans les démarches de la France contre la Prusse au sujet de cette convention fameuse, cela tenait évidemment à d’autres raisons qu’à un sentiment d’hostilité pour la Pologne, et M. Drouyn de Lhuys lui-même se déclarait « satisfait » de la réponse du cabinet de Vienne à cet égard (dépêche de lord Cowley du 5 mars). A la suite de divers entretiens avec le comte Appony, ambassadeur de l’empereur François-Joseph à Londres, lord Russell écrivait au comte Cowley 6 mars) : « La déduction à faire est que l’Autriche ne voit pas clairement son chemin dans le sentier que lui montre le gouvernement français (d’une action diplomatique contre la Prusse) et qu’il ne faut pas la croire tout à fait opposée à la politique dont on lui présente le contour » (averse to the policy of which an outline is presented to her). Elle n’en voyait pas cependant plus clairement son chemin dans le sentier que lui montrait lord Russell, et les représentations qu’il voulait provoquer pour faire revenir la Russie aux stipulations du traité de Vienne n’étaient pas du goût du cabinet autrichien. « Si l’on se proposait d’appliquer à la Pologne les engagemens pris par les puissances de 1815, pourquoi n insisterait-on pas sur toutes les stipulations de cette époque? » avait demandé malicieusement le comte Rechberg à lord Bloomfield (dépêche du 26 février) au premier bruit d’une pareille velléité du cabinet de Saint-James, et c’était là une épigramme à l’adresse de lord John, le grand promoteur de la reconnaissance de l’Italie. Le ministre autrichien oubliait seulement que son gouvernement, lui aussi, n’était pas tout à fait sans reproche devant ces traités, surtout en ce qui regardait la république de Cracovie. Quand le projet anglais fut formellement présenté au cabinet de Vienne, à la suite de la dépêche circulaire adressée par lord Russell le 4 mars à tous les signataires des traités de 1815, le comte Rechberg s’y montra très récalcitrant. « Son excellence ne croit pas que la proposition du gouvernement de sa majesté obtienne du succès à Saint-Pétersbourg, écrivait lord Bloomfield les 8 et 9 mars; elle ajouta qu’elle ne croyait pas que l’établissement d’une représentation nationale dans le royaume de Pologne nous rapprochât de la paix, car il est impossible de dire jusqu’à quel point iraient les aspirations polonaises, si la restauration de leur nationalité était sérieusement appuyée du dehors. » Déjà dans une importante communication au