Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 53.djvu/764

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ajouter : Il faut à l’Italie l’une de ces deux choses, ou une action immédiate et décisive du côté de Venise, ou bien une sécurité pacifique telle que, sans renoncer à ses espérances, elle puisse recueillir, par une réduction de son état militaire et un progrès notable vers l’équilibre financier, les avantages positifs de la paix véritable. « Si, a-t-on dû dire, nous renonçons à Rome, nous ne pouvons poursuivre de politique active donnant satisfaction au sentiment national que contre l’Autriche en Vénétie. En prévision d’une lutte prochaine avec l’Autriche, nous ne pourrions pas maintenir la capitale à Turin, qui serait à la merci d’un mouvement rapide de l’armée autrichienne, et déjà nous avons songé à placer la direction politique du royaume dans une meilleure capitale de guerre, à Florence, où nous serions protégés par deux lignes de défense, le Pô et l’Apennin. Si nous proposions partie à l’Autriche, la France serait-elle avec nous? » Si la question de guerre immédiate a été ainsi posée par les négociateurs italiens à leurs interlocuteurs français, ceux-ci ont dû faire un bond. La guerre dans la veine pacifique où nous sommes, lorsque nous sommes mal avec la Russie, lorsque l’Allemagne a pris goût aux lauriers militaires, lorsque l’Angleterre n’a d’autre politique que la paix quand même, c’est une extravagance à laquelle on ne peut s’arrêter un instant. On a dû bien faire entendre à l’Italie que, si elle se donnait le tort de l’agression contre l’Autriche, elle ne devait pas un seul instant compter sur le concours de la France. Soit, ont dû répondre les négociateurs italiens, peu surpris de voir toute idée de guerre écartée : l’Italie n’attaquera pas l’Autriche; mais, si la paix doit être conservée, que cette paix du moins repose sur de telles conditions qu’elle donne à l’Italie une sécurité complète. Dans l’état présent de l’Europe, l’Italie ne peut trouver de sécurité dans la paix qu’à la condition que la France lui donne devant le monde une garantie nouvelle et signalée de son bon vouloir et de sa ferme alliance.

Le gouvernement français a dû promptement tomber d’accord que, dans l’état présent de l’Europe, il lui importait autant à lui-même qu’au gouvernement italien de ne pas laisser l’Italie en l’air, de consolider par une affirmation réitérée les nouvelles destinées italiennes, de faire en un mot pour l’Italie quelque chose de décisif et d’éclatant. C’est en recherchant le témoignage à donner à l’Italie qu’on est revenu sur Rome. Sur la question vénitienne, un engagement de la part de la France de soutenir l’Italie contre toute agression de l’Autriche ne suffisait pas; les engagemens de cette nature demeurent ordinairement secrets, et il fallait un acte qui parlât aux esprits. On ne pouvait trouver les conditions d’un acte semblable que dans la question romaine. La difficulté sur ce point était de mettre d’accord les antécédens du gouvernement français avec les justes vœux de l’Italie. En principe, le gouvernement français a jusqu’à présent voulu la conservation du pouvoir temporel du pape dans de certaines limites, et en fait, depuis quinze ans, il maintient le pouvoir temporel par l’occupation armée de Rome. En principe, les Italiens réclament Rome