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comme capitale naturelle de l’Italie; en fait, ils supportent sans impatience la privation de Rome : ils ne demandent qu’une chose, c’est que le pouvoir temporel ne soit pas défendu par l’intervention étrangère, convaincus que, l’appui d’une armée étrangère manquant au pouvoir temporel, la force des choses et le temps réuniront infailliblement Rome à l’Italie. Pour mettre d’accord les antécédens du gouvernement français et les aspirations italiennes, on a pris et fondu ensemble en quelque sorte le minimum des uns et des autres. Le gouvernement français persiste à vouloir le maintien d’un certain pouvoir temporel; mais il ne se croit plus obligé à le protéger par la présence de ses troupes. L’Italie garde ses espérances dans l’avenir; mais, l’intervention étrangère cessant à Rome, elle consent à ne tenter ou à ne tolérer aucune agression matérielle contre le territoire pontifical. Tel est sans doute l’esprit de la convention qui vient d’être conclue. La transition de l’ancien ordre de choses au nouveau durera deux ans. Pendant ce temps, la France réduira successivement, jusqu’à leur retraite complète, ses troupes d’occupation. Pendant ce temps également, le pape pourra, s’il le veut, organiser une milice recrutée dans les divers pays catholiques et suffisante pour maintenir chez lui l’ordre intérieur. S’il le veut aussi, le souverain pontife arrangera ses finances en consentant à mettre à la charge du gouvernement italien la partie de la dette romaine afférente aux provinces de l’ancien état pontifical qui se sont annexées à l’Italie. Sur ces divers points, le pape agira comme il voudra : la France n’en sera pas moins engagée vis-à-vis de l’Italie à retirer ses troupes de Rome; l’Italie n’en sera pas moins engagée vis-à-vis de la France à ne pas envahir la limite du territoire pontifical. Dans tous les cas, ce que l’on se promet avec certitude, c’est que l’on verra commencer dans deux ans une expérience dont les Italiens ont toujours déclaré qu’ils ne redoutaient pas l’issue, l’expérience du pouvoir pontifical restant en tête-à-tête avec ses sujets, et ne s’exerçant plus sous la protection d’une armée étrangère.

A considérer les choses d’une façon théorique, ces arrangemens présentent à l’Italie de sérieux avantages. L’Italie ne fait qu’une concession morale, d’un caractère tout éventuel; elle obtient au contraire en sa faveur des gages très réels de la part de la France. La solidarité qui unit la France à l’Italie est considérablement accrue. La convention du 15 septembre efface officiellement les stipulations du traité de Zurich. L’ordre de choses que l’on veut inaugurer est la paix, mais non plus la paix précaire, la paix contestée, la paix au jour le jour, à laquelle l’Italie incertaine était condamnée depuis trois ans. Dans cet ordre de paix, et quoique de telles assurances ne soient point exprimées dans la convention du 15 septembre, l’Italie sans doute s’engage à ne pas attaquer l’Autriche au-delà du Mincio, mais elle peut compter sur l’alliance défensive de la France, si elle était attaquée elle-même par l’Autriche. On n’exige pas d’elle qu’elle ait une foi absolue dans le succès de l’expérience qu’on va tenter à Rome, on lui de-