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règlemens, et l’influence scientifique, qui prouve davantage, parce que chacun peut à son gré l’accepter ou s’y soustraire. Sans doute, pendant une période de dix à douze années, cette partie de la jeunesse qui ne songe qu’au diplôme s’est trop souvent dispensée des études philosophiques, et cela seul a été un mal dont les fâcheuses conséquences n’ont pas tardé à éclater; mais dans le même temps la philosophie spiritualiste a continué de voir ses chaires publiques entourées par une foule sérieuse, et ses livres anciens ou nouveaux lus, discutés, réfutés, défendus. Elle a vu, elle voit encore un groupe imposant d’économistes, de médecins, d’aliénistes, de physiologistes, de phrénologistes même[1], abandonner les routes sans issue de l’hypothèse matérialiste, et chercher dans l’analyse de l’âme par la conscience une base à leurs spéculations théoriques. Enfin, malgré les audaces, les habiletés et les flatteries du réalisme, ni la littérature tout entière, ni l’art tout entier n’ont été entraînés par les nouveaux courans.

Il y a plus cependant : en dehors des cadres ordinaires de l’enseignement et de la science, des hommes qu’aucun lien très intime ne rattache à l’école spiritualiste consacrent d’honorables efforts et un talent réel à consolider et à développer les propositions essentielles sur lesquelles se fonde la philosophie de l’esprit. Ces penseurs et leurs livres témoignent, eux aussi, en faveur d’une influence qui semble ne s’être affaiblie d’un certain côté que pour s’étendre dans un autre sens. Et non-seulement ils attestent, en la subissant, cette influence que l’on prétend épuisée, mais ils avouent hautement leur dessein de travailler à la répandre. À ce double titre, ils méritent que la philosophie qu’ils servent étudie leurs écrits et discute leurs idées. Parmi ces récens auxiliaires de la métaphysique spiritualiste, il en est trois qui ont à un notable degré ce goût de la recherche personnelle et de la nouveauté qui, selon qu’il est bien ou mal dirigé, développe les doctrines ou les compromet. Ce sont M. Huet, ancien professeur à l’université de Gand, fidèle et reconnaissant disciple de Bordas-Demoulin, M. J.-E. Alaux et M. Hippolyte Destrem. Des ouvrages divers par l’étendue et par le mérite, mais animés d’un même esprit, recommandent ces trois écrivains à l’attention du public et de la critique. Nous ne saurions néanmoins entreprendre de les suivre pas à pas dans leurs investigations, tantôt profondes, tantôt subtiles, souvent inattendues, quelquefois heureuses : ce ne serait rien moins que passer en revue la philosophie tout entière. Entre les points qu’ils ont abordés, nous ne

  1. Voyez la Phrénologie spiritualiste, nouvelles études de psychologie appliquée, par M. le docteur Castle, deuxième édition, 1864.