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Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 56.djvu/135

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pavillon, et si la question n’était pas encore résolue, du moins cet acte de vigueur était propre à faire réfléchir les daïmios les plus orgueilleux et les plus puissans. Ce qu’il y avait de particulièrement curieux, c’était l’attitude des Japonais et la façon dont ils appréciaient ces divers événemens. Pour les gens du peuple, tout cela n’était qu’une sorte de spectacle auquel ils assistaient en curieux et sans s’y mêler ; la crainte des yacounines eût suffi d’ailleurs pour leur imposer la discrétion la plus absolue. Quant aux gouverneurs de Yokohama, ils vinrent à bord de la Sémiramis demander des détails sur l’engagement, et félicitèrent l’amiral d’un succès qui, disaient-ils, était favorable au taïkoun. Les autorités de Nagasaki tinrent le même langage à notre consul ; mais, malgré l’issue des combats de Simonoseki, le gorodjo ne paraissait pas vouloir s’arrêter dans son essai de mise à néant des traités conclus. Le 24 juillet, répondant aux plaintes adressées par M. de Bellecourt à Yédo à la suite de l’agression du Kienchan, il exprimait son étonnement qu’un des princes eût osé attaquer un navire français, et il s’engageait à examiner sérieusement l’affaire. Il ajoutait cependant : « Nos envoyés, dites-vous dans votre lettre, vous ont déclaré que notre gouvernement n’est pas en mesure de forcer quelques-uns des princes à l’obéissance. Un tel état de choses n’existe pas en réalité, et cette assertion ne peut avoir d’autre base qu’un malentendu survenu dans les conférences. »

Devant ces réponses évasives et dilatoires à de justes récriminations, les représentans des puissances durent se concerter immédiatement pour l’adoption d’une ligne de conduite commune. Le 25 juillet, les ministres et chargés d’affaires de France, d’Angleterre, des États-Unis et des Pays-Bas, réunis en conférence, déclarèrent qu’il était indispensable, sous peine de voir les Japonais méconnaître peu à peu les clauses encore observées des traités, de procéder, avec le concours des forces navales actuellement au Japon, à la réouverture de la Mer-Intérieure, passe nécessaire à la navigation commerciale ; le gouvernement de Yédo serait informé de cette décision et verrait dans un délai déterminé à satisfaire les puissances avant que celles-ci engageassent les opérations militaires. Appelés à donner leur avis, les commandans en chef opinèrent pour qu’on se pressât moins d’agir. La liberté de la Mer-Intérieure ne ressortant pas catégoriquement des termes des traités, il était selon eux plus naturel d’exiger tout d’abord l’exécution des clauses dûment stipulées. Seulement, comme la Grande-Bretagne en particulier avait des réparations formelles à exiger du prince de Satzouma, l’amiral Kuper résolut de se porter chez ce prince avec une partie de sa division navale, tandis que l’amiral Jaurès resterait à Yokohama pour veiller à la sûreté de la ville, Le gouvernement