les plantes de cette région au point que, même dans les herbiers, on les retrouve encore comme imprégnées d’une légère poussière de diamant. Le gneiss ressemble beaucoup au granit, dont il contient à peu près tous les élémens ; mais il est lamelleux et feuilleté au lieu d’être grenu, et l’on n’y distingue pas ces beaux cristaux de quartz et de feldspath qui donnent au granit une texture si reconnaissable.
La première fois que je pénétrai dans la vallée de Saint-Nicolas, elle ne m’apparut pas sous ces couleurs riantes que je lui trouvai plus tard, quand je la revis illuminée et tout étincelante au soleil de midi. Nous étions arrivés à Viège après être entrés la veille dans le Valais par le glacier du Gries, qui ouvre un passage à l’extrémité de la vallée italienne de Formazza. Nous partîmes à six heures pour Stalden ; nous avions deux lieues à faire, et en marchant vite on pouvait arriver avant la nuit close, quoiqu’on fût déjà en septembre, et que dans ces gorges dirigées du nord au sud le soleil disparaisse derrière les hautes arêtes longtemps avant de descendre sous l’horizon. Bientôt d’ailleurs le ciel s’obscurcit, de gros nuages tout gorgés d’eau accouraient à notre rencontre et formaient au-dessus de nos têtes un rideau livide qui interceptait les derniers rayons du jour. Quand nous arrivâmes à Neuebrücke, l’obscurité était déjà complète. Neuebrücke est un de ces sites qui présentent au paysagiste un tableau tout fait. Lignes, couleurs, avant-plan, fond, tout est disposé à souhait. On est encore dans la zone moyenne dont l’art peut rendre les aspects, et l’on a cependant des échappées sur ces hautes régions qui attirent l’imagination et que le pinceau peut faire deviner en quelques touches. Un pont hardi franchit la Visp de son léger plein-cintre ; il s’appuie des deux côtés sur de magnifiques rochers noirs qu’égaie par endroits le vert tendre des fougères : à gauche, quelques granges en troncs de mélèzes brunis par le temps ; à droite, des chalets que surmontent une chapelle et quelques noyers au tronc bas et noueux ; au-dessous, le torrent qui écume ; tout au fond, des parois abruptes et un coin du glacier de Balferin. Töppfer, dans ses Nouveaux voyages en zigzag, a fait un croquis fidèle de ce coin ravissant. Bien entendu nous ne vîmes rien de tout cela en y passant la première fois. La nuit était venue, et la pluie tombait à grosses gouttes, drues et tièdes. De Neuebrücke à Stalden, le sentier suit la rive gauche du torrent. Nous avancions avec précaution, le bâton sans cesse appuyé contre la paroi du rocher que nous avions à notre droite et guidés par cette traînée légèrement lumineuse que les eaux en mouvement projettent toujours dans les ténèbres. Tout à coup il nous sembla entrer dans une caverne. Ces confuses lueurs même disparurent ;