réduits, faute de moyens efficaces pour attaquer une roche aussi dure. Les Romains peut-être ne se seraient point laissé décourager par ces difficultés, et auraient opposé aux résistances de la nature les efforts de leur volonté et de leur énergie ; mais le génie des Grecs n’était pas fait pour s’obstiner aux laborieuses entreprises de ce genre, il se prêtait moins aux travaux pratiques qu’aux sublimes conceptions et aux grandes œuvres de l’art. Leur tentative n’en atteste que plus fortement combien la nécessité de cette opération et les avantages qui doivent en résulter avaient frappé les esprits dès cette époque reculée.
La disposition intérieure des katavothres est restée longtemps enveloppée de mystère. L’accès en est difficile, et les habitans du pays n’osaient guère s’aventurer près de ces cavernes peuplées par leur imagination de fantômes et de mauvais esprits. En 1856, à la suite de deux années de grande sécheresse, M. Bulgaris, alors ministre de l’intérieur, voulut faire visiter minutieusement les katavothres et le marécage accidentellement assaini. Quatre cents ouvriers furent envoyés d’Athènes au Copaïs. On trouva par exemple à l’entrée du grand katavothre de Képhalari une belle et spacieuse caverne dont la voûte va en Rabaissant peu à peu ; à 90 mètres de l’ouverture, un étranglement se produit, et il n’existe plus qu’une étroite fissure qu’un homme peut parcourir sur une longueur de 25 mètres environ, tantôt ployé, tantôt debout. Au-delà, toute exploration devient impossible. L’intérieur des autres émissaires présente la même configuration dans des proportions moins considérables. Après avoir soudé et élargi quelques fissures, enlevé quelques blocs de rocher, on reconnut l’impossibilité de procéder efficacement au curage de ces souterrains à cause des difficultés de toute nature et des dépenses exorbitantes qu’entraînerait une telle opération pour un résultat douteux et sans cesse compromis par de nouveaux éboulemens, En revanche, il fut constaté que la plaine du Copaïs, mise à nu presque partout par une sécheresse exceptionnelle, est parfaitement unie, et que le sol, une fois débarrassé de la couche de vase entretenue par la stagnation des eaux, n’offre aucun des caractères constitutifs d’un marécage proprement dit[1].
- ↑ Depuis longtemps déjà, un philhellène distingué, M. Adolphe d’Eichthal, avait, à ses frais, envoyé en Grèce M. Sauvage avec tout le personnel nécessaire pour explorer la plaine et étudier la question du dessèchement. Les résultats de cette étude ont été consignés par M. Sauvage dans un remarquant mémoire qui, après être resté quatorze ans enfoui dans les cartons ministériels, a été enfin publié en 1863 par ordre du gouvernement grec, qui l’a pris pour base d’un projet de loi sur l’assainissement de ces marais. Les données essentielles sur lesquelles repose ce mémoire n’ont pas varié. Les seules modifications qu’on pourrait y introduire aujourd’hui sont celles que les progrès de la science et de récentes découvertes apporteront naturellement au moment de l’exécution des travaux proposés. M. Sauvage et M. d’Eichthal s’étaient occupés aussi de l’élargissement et du creusement du détroit de l’Euripe, qui sépare l’Ile d’Eubée de la terre ferme. Cette passe était infranchissable, car elle n’offrait qu’une largeur de 13 mètres et une profondeur de 2 mètres au plus. Les navires en destination de Salonique et de Constantinople étaient contraints de tourner l’Ile en doublant avec de grandes difficultés le cap d’Oro, constamment assiégé par des vents du nord furieux. A la suite de travaux achevés en 1855, le canal de Négrepont a été livré tout entier a la navigation. L’Euripo a aujourd’hui une largeur de 22 mètres et une profondeur de 6m,50. En outre un pont tournant, construit à Marseille, a été jeté sur le détroit et réunit l’Eubée à la terre ferme.