les contrastes les plus séduisans, La ville haute est assise sur des roches massives et bizarres dont les arêtes surgissent au-dessus des maisons et se confondent avec les ruines d’une forteresse bâtie par les Catalans. Là, de profondes crevasses, d’humides anfractuosités, des formes tourmentées, fatiguent le regard, en même temps que le souvenir des sombres traditions de l’oracle attriste la pensée. Plus bas, la scène change et s’anime : dans les rues, propres et bordées de bazars à l’entrée desquels flottent des étoffes aux vives couleurs, circule une population affairée et joyeuse qui jouit à bon droit par toute la Grèce d’une grande réputation de douceur et d’hospitalité. Des minarets sveltes, d’une élégance tout orientale, à la pointe à moitié dédorée, s’élancent par-dessus les lourdes coupoles des églises byzantines. Des cyprès, des peupliers, des platanes, ombragent les toits et les terrasses. Le torrent qui roule à travers la ville suffirait seul à la remplir de vie et de poésie, et fait entendre sa voix, douée de mille timbres divers, tristes et grandioses, argentins et joyeux, suivant la hauteur de ses diverses chutes. Dans la plaine, il se transforme en une douce et calme rivière dont le flot transparent baigne une longue file d’habitations où respire l’aisance. Il fait tourner de nombreux moulins et poursuit sa course vers le Copaïs sous un berceau de verdure. La ville de Livadie offre donc un aspect bien différent de celui de la plupart des autres villes de la Grèce, où le spectacle de la pauvreté, de la paresse et de l’ignorance du peuple cause une pénible impression au voyageur. Les habitans possèdent presque tous quelques terres sur les bords du lac ou dans les vallées voisines ; ils s’adonnent avec succès à l’agriculture ; l’habitude du travail élève et adoucit leurs mœurs. Lorsque les projets dont se préoccupe le gouvernement seront réalisés, cette ville sera la première à en recueillir les bénéfices et deviendra l’une des plus florissantes du royaume. Elle sera l’entrepôt de tous les produits de la plaine, le centre d’un trafic et le point de départ d’une exportation qui ne tarderont pas à atteindre des proportions considérables, le siège de plus d’une industrie qui trouvera dans l’onde rapide et intarissable de l’Hercyne un moteur puissant et économique.
Le double phénomène de l’inondation qui pendant l’hiver transforme la plaine du Copaïs en un lac vaste et profond, et du retrait des eaux qui, en s’opérant imparfaitement pendant l’été, fait du lac un marais, s’accomplit par périodes régulières. Les pluies, plus abondantes dans cette région que dans les autres contrées de la Grèce, commencent généralement au mois d’octobre, augmentent dans les mois de novembre et de décembre, et atteignent leur plus grande intensité pendant le mois de janvier ; elles diminuent ensuite graduellement et cessent vers le milieu du mois de mars,