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le ramena au combat. Lord Derby dans un discours, avait fait honneur à l’Autriche de la douceur de son gouvernement, des améliorations qu’elle avait réalisées en Italie. Pasini prit occasion ; de ces paroles pour tracer dans quatre lettres substantielles, serrées, lumineuses, le tableau de l’administration financière de l’Autriche, des exactions auxquelles les provinces lombardo-vénitiennes, avaient été soumises, des inégalités et des exagérations d’impôts qui exténuaient le pays. Ce procès de l’administration financière de l’Autriche, Pasini l’avait commencé dix ans auparavant à Lugano. ; il l’avait continué à Turin : c’était le thème du mémoire remis à l’archiduc Maximilien. Les Lettres à lord Derby le résumaient en lui donnait plus d’éclat et surtout un intérêt plus actuel. On peut dire que toutes les données sous lesquelles l’administration autrichienne est restée accablée viennent de là. La conclusion, c’était, en dehors même de toute considération morale, l’impossibilité matérielle du gouvernement de l’Autriche en Italie. « On accroît les impôts pour refuser la liberté, disait-il, on refuse la liberté pour accroître les impôts. » Dès ce moment, Pasini était tout entier dans le mouvement. Plus que tout autre, il se prononçait après Villafranca pour l’unification de l’Italie, à tel point que lui, Vénète, il faisait tous ses efforts pour dissuader la Toscane d’accepter le retour du grand-duc au prix d’une autonomie trompeuse accordée à la Vénétie, et il fit même un cours public pour développer cette thèse, « que toutes les provinces d’une nation, dès qu’elles étaient libres, devaient s’unir en un seul état. » Bientôt après, il entrait dans le premier parlement italien, et à partir de ce moment c’est le député laborieux, zélé, uniquement préoccupé d’affermir ce qui était le prix de tant d’efforts, en attendant que l’unité nationale allât embrasser la Vénétie elle-même.

Il faut tout dire, Valentino Pasini ne prenait pas du premier coup sa vraie place dans le parlement italien. Il était apprécié, grandement estimé de ceux qui le connaissaient, notamment de Cavour, qui voyait en lui un des hommes les plus utiles. Il était peu connu de beaucoup d’autres, peut-être à cause de sa simplicité naturelle, peut-être aussi parce qu’il avait encore à lutter contre les ombrages et les méfiances de certains esprits passionnés. Bientôt cependant, à mesure que les grandes questions administratives et financières se présentaient dans les débats parlementaires, il montrait sans effort, sans affectation, ce qu’il était, ce qu’on pouvait attendre de son aptitude. C’est lui qui devenait en quelque sorte le rapporteur naturel de toutes ces grandes mesures telles que la création du grand-livre de la dette publique, les principales lois d’impôts, la formation du budget. Nul plus que lui, en effet, ne connaissait à