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poudre soient autant que possible à l’abri d’un tir plongeant, lorsque dans le cours du combat les navires s’élongeront bord à bord. Il est donc indispensable que les lianes soient cuirassés dans la partie moyenne jusqu’à une hauteur suffisante et sur une longueur égale à celle des tours ; dès lors il paraît convenable et peut-être utile de conserver derrière ce blindage quelques pièces d’artillerie en batterie couverte, à la condition de ne pas leur demander plus qu’elles ne peuvent fournir. Donner de larges sabords à cette batterie pour accroître le champ de tir serait accepter de bien grands inconvéniens pour un avantage très incertain, car on se trouverait ainsi plus exposé aux coups d’embrasures et au feu des carabines de l’ennemi ; ces pièces ne devront pas servir dans le cours ordinaire du combat : au milieu des nombreuses et rapides évolutions des bâtimens, elles perdraient dans le vide la plus grande partie de leurs projectiles, et elles risqueraient de se trouver paralysées au moment où le concours pourrait en être le plus efficace. On devra précieusement en réserver le tir pour les circonstances déjà indiquées, d’ailleurs assez fréquentes, où les bâtimens s’élongeront bord à bord, et elles devront être disposées de manière à permettre de frapper l’ennemi à sa flottaison et surtout à son arrière pour ébranler son gouvernail ; les sabords devront être très étroits et oblongs afin de permettre un pointage négatif[1] suffisant pour le tir à bout portant, et ces pièces, quoique très longues, pourraient être plus rapprochées que sur nos anciens vaisseaux, puisque la direction du tir serait invariable. On consacrerait à ces batteries couvertes des pièces très puissantes contre les cuirasses, jusqu’à 200 où 300 mètres seulement, ce qui permettrait de réaliser une économie de poids, et on réserverait pour les tourelles les pièces d’artillerie qui auraient une puissance réelle à une distance plus considérable.

Nous avons déjà parlé des coupoles tournantes des monitors américains, et nous avons cru pouvoir affirmer que les États-Unis font fausse route en cherchant à construire des monitors sur une grande échelle pour en faire des navires de combat capables de tenir la haute mer ; mais leurs constructions ne se bornent pas à un seul type de navires : dès 1863, ils possédaient de grandes frégates cuirassées, entre autres le Roanoke, dont le pont porte trois tours semblables à celles des monitors, renfermant chacune deux canons qui lancent des projectiles de 440 livres. Depuis, ils ont construit et lancé plusieurs autres cuirassés de haut bord, et ils paraissent avoir définitivement adopté la disposition des tours pivotantes pour

  1. Un pointage est dit positif ou négatif selon que l’axe de la pièce est dirigé en dessus ou en dessous de l’horizontale.