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Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 72.djvu/769

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et qui est la consolation et l’encouragement des amis de la liberté humaine.

Nous ne nous faisons donc point illusion sur le grand fracas qui, à propos de l’Italie et de Rome et par les premières discussions parlementaires, va pendant quelques jours émouvoir les âmes françaises et les détourner un moment de la préoccupation de nos libertés intérieures. Nous ignorons à quelle époque de la session se produiront les débats sur la loi de la presse et sur le droit de réunion. Il est probable que notre vicieuse procédure parlementaire retardera la discussion de ces lois. Le renvoi des amendemens aux commissions, la nécessité de délibérations nouvelles et de rapports supplémentaires font perdre un temps infini et ralentissent démesurément les travaux de la chambre. On eût pu jeter de haut un coup d’œil sur la politique intérieure, si l’interpellation de M. Jules Favre et de ses amis eût été accueillie ; mais la majorité réglementaire des bureaux n’en a point autorisé les développemens. Il faudra attendre une autre occasion, la discussion du budget de l’intérieur peut-être, pour entamer ce grave sujet. Cependant l’opinion publique était mûre pour apprécier les lacunes qui se révèlent avec un triste éclat, même dans les garanties de nos libertés civiles. Malgré l’affaiblissement et l’inertie de nos mœurs publiques, il reste encore parmi nous des natures de forte trempe qui ne peuvent supporter les conséquences de l’arbitraire et qui ont l’énergie de les attaquer de front. De ce nombre est à coup sûr l’honorable M. Casimir Perier. Il y a un inexprimable contentement de cœur à voir revivre ce grand nom avec les qualités de force virile et de persévérance de celui qui l’a le premier illustré dans une longue opposition et dans un trop court ministère. M. Casimir Perier vient de publier un écrit qui marquera une date dans l’histoire de nos polémiques politiques ; c’est un commentaire de l’article 75 de la constitution de l’an VIII sous le régime de la constitution de 1852. On a fait l’expérience récente des conséquences énormes du privilège conféré aux agents de l’administration par cet article d’une constitution qu’on fait survivre comme loi si longtemps après qu’elle a été abolie dans sa vertu constitutionnelle. Ce privilège ne permet la poursuite devant les tribunaux des agens administratifs pour des délits commis dans l’exercice de leurs fonctions que lorsqu’elle a été autorisée par le conseil d’état. La saisie opérée sur l’ordre de M. de Persigny, alors ministre de l’intérieur, des exemplaires de l’Histoire de la maison de Condé, par M. le duc d’Aumale, a produit une situation où les citoyens se trouveraient désarmés contre les actes du pouvoir administratif qualifiés arbitrairement par un ministre comme des actes de gouvernement. Dans ce cas, des Français, et on ne peut alléguer contre M. Michel Lévy les prétextes qu’on a opposés à M. le duc d’Aumale, se sont vu enlever leur propriété sans pouvoir saisir aucun tribunal de leur plainte et sans que le conseil