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vertus qui s’imposent au gouvernement des sociétés modernes. Il faudrait obéir aux plus sévères scrupules dans l’administration des finances. Un pouvoir intelligent et patriote devrait mettre son point d’honneur à réduire la dette publique, à diminuer les impôts, à ramener constamment les dépenses à un niveau inférieur à celui des revenus. Ce ne sont point malheureusement ces vertus qu’on pratique depuis longtemps parmi nous. Nous avons augmenté notre dette pour des guerres dont les avantages politiques se sont évanouis, mais dont nous porterons à jamais les charges. Bien plus, nous continuons à nous endetter en temps de paix. Les hommes qui prennent part au gouvernement de la France devraient être confus d’avoir à nous découvrir des besoins d’argent et des nécessités d’emprunts du présent à l’avenir naissant en pleine paix. Il y a là une affaire non-seulement de prudence, mais de probité politique qu’on n’a pas l’air de vouloir comprendre en France. Il n’est point honnête, pour la satisfaction des fantaisies prodigues du présent, d’augmenter aveuglément les charges des générations qui doivent nous survivre. Malheureusement en cela nous nous trouvons encore en face des résultats de fautes passées qu’il est indispensable de réparer et de liquider. C’est d’abord aux finances de l’état qu’il faut aviser. On ne pourrait demeurer longtemps sans péril sous la menace d’une dette flottante aussi considérable que celle qui existe. Si l’on fait ressource des rentes appartenant à la caisse de la dotation de l’armée, et si l’on porte dans l’avenir au budget les engagemens de cette caisse, la combinaison équivaudra en réalité à un emprunt. Même en voulant être dur pour les victimes de la banqueroute du Mexique, il faudra au moins leur restituer la réserve qui devait recomposer leur capital en rentes françaises, accrue des sommes que la France a prélevées en vertu de ses arrangemens financiers avec Maximilien et en compensation de ses frais de guerre sur le produit des emprunts mexicains. On voit que le plus strict devoir prescrit l’économie dans la rédaction du prochain budget des dépenses. La chambre et le public auront d’ailleurs une occasion singulière de s’éclairer sur l’étourderie avec laquelle on brave en France les périls financiers, s’il est vrai, comme on le rapporte, qu’une autorisation d’emprunt va être demandée pour la ville de Paris. Nous avons vu depuis quelque temps les opérations de finances étranges auxquelles s’est livrée l’administration de la ville de Paris, et dont l’étendue a été révélée par la somme énorme d’obligations communales émises par le Crédit foncier. Cette administration entreprenait les gigantesques et luxueux travaux que l’on sait ; quant aux voies et moyens, la loi qui veut que les emprunts municipaux soient sanctionnés par le corps législatif était éludée sans souci. Des délégations à échéance de quelques années et qu’on devait acquitter avec les excédans probables des revenus de la ville étaient délivrées aux entrepreneurs,