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à un point de vue purement chimique, peut-être ne sera-t-on pas fâché de savoir de quelle manière on décèle dans les étoffes la présence de la laine et de la soie, comment on peut constater le mélange de ces fibres animales avec d’autres matières de provenance végétale, telles que le lin, le chanvre, le coton. Il existe entre la laine et la soie une différence caractéristique. La première, renfermant du soufre, se colore en noir quand on la met en contact avec un liquide légèrement chauffé tenant en dissolution du plombite de soude. Il se forme alors un sulfure de plomb brun et opaque. La soie au contraire reste sensiblement incolore dans les mêmes conditions. Enfin, quand un tissu contient du coton ou toute autre substance végétale mélangée à de la laine ou à de la soie, il suffit, pour s’assurer de la fraude, de le plonger dans une solution de soude caustique bouillante. La soie et la laine s’y dissolvent à l’instant ; les fibres végétales ne sont pas attaquées. Le microscope fournit aussi un moyen de reconnaître s’il existe des libres de coton dans les étoffes de fil et même dans les pâtes à papier. Les fibres provenant du chanvre ou du lin se montrent toujours à l’état de tubes cylindroïdes ou irrégulièrement prismatiques dont les parois épaisses maintiennent les formes, tandis que les tubes à très minces parois qui constituent le coton se trouvent aplatis, contournés, et offrent l’apparence de rubans.

C’est encore au microscope qu’il faut avoir recours pour distinguer si le papier contient des membranes extraites du bois ou ces fibres ligneuses qui forment depuis peu de temps une des matières premières des papeteries. Les moyens nouveaux employés pour cette préparation méritent de nous arrêter quelques instans. Parmi les nombreux échantillons, de papier exposés au Champ de Mars, la plupart renfermaient des pâtes préparées avec des substances qui, jusqu’à ces derniers temps, n’avaient pas été utilisées pour cet usage, dont plusieurs même y étaient généralement regardées comme tout à fait inapplicables. La proportion en poids de ces matières nouvellement introduites varie entre 25 et 85 pour 100. Cette révolution était prévue, elle était nécessaire. La chimie avait montré que toutes les substances auxquelles la papeterie a maintenant recours contenaient le principe immédiat des végétaux, la cellulose, élément essentiel du papier. De plus cette cellulose s’y trouvait sous forme de fibres ou de membranes allongées que le feutrage qu’on fait subir à la pâte unit et entre-croise, et qui doivent assurer la solidité de la feuille de papier. La théorie semblait donc recommander de ne pas négliger les ressources qu’offraient beaucoup de végétaux ; d’un autre côté, les anciennes sources d’approvisionnemens de chiffons semblaient se