Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 72.djvu/894

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

sont que l’œuvre d’un grossier empirisme. Ici comme partout, c’est l’observation empirique qui doit nous tracer la route scientifique. La science commence seulement à pénétrer dans l’étude des phénomènes de la vie ; mais elle marche dans une voie qui lui permettra certainement d’éclairer avec le temps toutes les obscurités qui couvrent maintenant les divers problèmes de la physiologie générale.

La physiologie est destinée à servir de base à toutes les sciences qui veulent arriver à régir les phénomènes de la nature vivante ; ces sciences intéressent par conséquent l’humanité au plus haut degré. L’agriculture ne saurait se fonder sur les seules sciences naturelles. Elle s’appuie nécessairement sur les sciences expérimentales, sur la physique et la chimie d’un côté et sur la physiologie animale et végétale de l’autre. L’hygiène et la médecine d’observation, fondées par Hippocrate depuis vingt-trois siècles, ne pourront donner naissance à la médecine expérimentale et sortir de l’empirisme que lorsque la physiologie expérimentale leur fournira le point d’appui qui leur manque. La physiologie est donc une science nouvelle sur laquelle on doit fonder les plus légitimes espérances, et que l’on doit protéger et développer le plus possible.

Tout ce que nous avons dit en commençant sur la nécessité de séparer dans les sciences biologiques le problème des sciences naturelles du problème des sciences expérimentales ne se rapporte point seulement à une distinction purement théorique qu’il convient de faire entre la physiologie d’une part, la zoologie et la phytologie ou botanique de l’autre ; il s’agit encore d’une séparation pratique qu’il faut établir entre ces sciences et qui est destinée à exercer la plus grande influence sur leurs progrès réciproques. Les sciences procèdent analytiquement dans leur développement ; c’est pourquoi il s’est établi successivement des divisions et des subdivisions scientifiques qui continuent encore ; mais en se divisant et en se subdivisant les sciences ne font que s’accroître et s’épanouir en des problèmes nouveaux qui s’engendrent les uns les autres sans se confondre ni s’amoindrir. Le problème des sciences naturelles biologiques ne perdra rien de son importance en se séparant du problème des sciences expérimentales physiologiques. Au contraire, les deux ordres de sciences ne s’en développeront que plus librement et avec plus d’éclat ; mais la physiologie expérimentale, constituant un plus jeune rameau de l’arbre scientifique, tire nécessairement la sève du tronc et des branches inférieures des sciences biologiques : d’où il suit que les progrès particuliers de cette dernière science doivent être considérés non-seulement comme des résultats dus à la culture d’une science distincte, mais encore comme le fruit de l’évolution totale des autres sciences biologiques.