ils ont le droit d’y prétendre ; mais il n’est que temps pour eux de se mettre sérieusement à le poursuivre.
C’est encore la perfidie des femmes qui fournit le texte du proverbe assez sémillant que M. Legouvé vient de faire représenter au Théâtre-Français avec un succès qu’expliquent en partie les considérations que nous développions tout à l’heure. M. Legouvé lui-même subirait-il l’influence du courant d’idées qui semble porter nos auteurs à voir les femmes en laid, et serait-il permis de voir un « signe des temps » dans cette défection du plus fervent de leurs admirateurs? Une coquette battue sur son propre terrain par un jeune homme qui feint d’abord de se laisser prendre à ses pièges, tel est le sujet de la nouvelle pièce, dont le titre, A deux de jeu, exprime du reste la donnée avec une concision expressive. Ce thème n’est pas absolument neuf; M. Legouvé l’a agrémenté de quelques incidens qui ne témoignent pas d’une fertilité d’invention bien miraculeuse, et dont cette bluette n’avait que faire. C’est pour sauver son frère, près de faire un mariage inespéré, qu’Edouard Huber entre presque d’assaut, à l’aide d’un gros mensonge et couvert par un faux nom, chez la dangereuse marquise coupable d’avoir aimé ce frère imprudent. Il faut toujours qu’il y ait un mariage riche dans les pièces de M. Legouvé. Aucun biais ne lui coûte pour prôner la morale et les belles alliances. Il y avait urgence à rendre odieuse la femme que l’on va berner si peu galamment, car son adversaire, en prenant un masque pour la combattre, risquait de rendre sa victoire peu sympathique. M. Legouvé a essayé d’en faire en effet une perfide indigne de pitié, et a réussi surtout à la rendre un peu plus perfide que nature. Quoi qu’il en soit, des mouvemens de scène qui ne laissent pas d’être piquans, quelques mots heureux, une interprétation fort habile, ont fait oublier à des spectateurs que force pièces récentes et parfois M. Legouvé lui-même avaient soumis à de bien autres épreuves, graviora passi, combien singulière était la route choisie par l’auteur pour nous conduire à un dénoûment trop prévu. L’inspiration dramatique se comporte chez nous comme les fleuves. Elle est dans cette saison à son point d’étiage. Espérons que, comme les fleuves, elle ne tardera point à reprendre son niveau normal.
ALFRED EBELOT.
On ignore généralement combien se complique d’infinis détails l’art de faire un jardin. Il faut autre chose que des parterres élégamment