Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 77.djvu/998

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ment de succès. Jeunes et vieux étudient côte à côte avec assiduité, et l’on a vu se produire ce fait assez caractéristique d’un concours établi durant les jours du carnaval, et auquel les écoliers de tout âge vinrent travailler sans se soucier davantage des fêtes marquées par le calendrier.

L’école dont nous parlons est gratuite. La manière dont on y procède au commencement des études nous paraît digne d’être signalée. On ne met pas d’abord aux mains de l’élève le papier et le crayon. On lui donne simplement un morceau de craie et on le place en face d’un tableau noir. Il passe quelques mois dans cette classe élémentaire dont la commune fait tous les frais, frais peu coûteux, comme on le voit. Il s’habitue à dessiner à main levée, à ne pas se contenter d’un premier trait, s’il est défectueux, à revenir sur ce qu’il a fait jusqu’à ce qu’il soit content de son esquisse. Il s’accoutume surtout, et cela est un point capital, à dessiner largement, d’une façon hardie, sans se préoccuper outre mesure du détail. Quand plus tard on l’autorise à se servir du papier, il est bien un peu désorienté d’abord, mais cela ne dure point, et il marche résolument dans la voie tracée, les premiers pas et les plus difficiles étant déjà franchis. Dans les classes supérieures, dès que l’ouvrier a acquis quelque certitude de coup d’œil et de main, il est mis aux prises avec des modèles qui lui sont directement utiles ; il y a la classe de dessin de mécanique, celles du dessin de construction et d’architecture, du dessin d’ornement, du modelage.

II.

Deux nations, l’une au-delà du Rhin, l’autre au-delà de l’Atlantique, enseignent au monde à l’heure présente ce que peut l’instruction. L’une est la Prusse, née d’hier, devenue comme par enchantement une puissance de premier ordre ; l’autre est la grande république des États-Unis. Ni l’une ni l’autre n’a conquis en art une supériorité réelle. Ces deux pays ne se sont pas encore signalés par d’énergiques efforts concentrés sur un seul objet et dans une seule main, comme on le voit au comité de South-Kensington. Quand ils en seront là, on ne peut guèie douter que leurs res- sources d’esprit, de volonté et d’argent ne les mènent assez rapidement à bonne fin. Pour l’instant, l’Allemagne tout entière est préoccupée d’autre chose, d’une chose plus essentielle et plus urgente : la vieille Germanie cherche son organisation politique, — la Prusse au nord avec le despotisme militaire, l’Autriche au midi, nouvelle adepte, avec la liberté. Le Wurtemberg, la Bavière et la Saxe, qui n’ont point de moindres soucis, ne négligent pas