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Madame de Queyrel.

Vous vous trompez. On peut regarder mon mari de toutes les façons possibles sans me troubler le moins du monde.

Madame Valery.

Oh ! que je ne crois pas cela !

Madame de Queyrel.

C’est bien simple, essayez.

Madame Valery, elle se remet à travailler.

Cela serait une épreuve pour rire, entre nous…

Madame de Queyrel.

Épreuve pour rire que vous ne supporteriez pas, vous, ma chère.

Madame Valery.

Me prenez-vous pour une petite fille ? Oh ! soyez aimable avec George tant qu’il vous plaira… (Petit sourire jaune.)

Madame de Queyrel.

Faites les yeux doux à Ernest, si bon vous semble. (Même petit sourire. — Elles travaillent avec ardeur pendant un instant.)

Madame Valery.

Ah ! tenez, nous disons là des folies. Embrassons-nous, et parlons d’autre chose.

Madame de Queyrel.

Très volontiers. (Elles s’embrassent.) C’est qu’aussi vous avez des idées si drôles !…

Madame Valery.

Ah ! pardon, c’est de vous, l’idée.

Madame de Queyrel.

L’idée de…

Madame Valery.

Vous me faites rougir… Sommes-nous enfans !… (un silence.) Où sont donc mes ciseaux ?

Madame de Queyrel.

J’ai là un canevas qui me fait damner !

Madame Valery.

Qui est-ce qui vous dessine vos tapisseries ?

Madame de Queyrel.

Qu’est-ce que vous dites ?

Madame Valery.

Je ne sais plus… Qu’est-ce que je disais donc ? (Elles se regardent et éclatent de rire.) Savez-vous qu’il y a des femmes que l’épreuve pour rire tenterait,… deux femmes qui seraient bien sûres l’une de l’autre.

Madame de Queyrel.

Ah !… assurément.

Madame Valery.

Ah !… c’est positif.