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mens ne furent plus qu’une cérémonie d’apparat. Il y a eu un temps où Oxford et Cambridge conféraient des titres aux candidats sur leur bonne mine; à Naples, on vit mieux encore : la noble famille d’Avellino possédait le privilège de conférer le grade de docteur en droit ou en médecine et de percevoir en argent les droits de diplôme. Les XVIIe et XVIIIe siècles furent au-delà des Alpes une époque de torpeur pour les arts et la littérature. Les sciences continuèrent, il est vrai, à briller d’un vif éclat avec Galilée, Torricelli, Spallanzani, Galvani et Volta. M. Arnold, en fervent disciple des lettres anciennes, ne manque pas de faire observer à ce propos que ceci est une preuve de l’impuissance de la culture scientifique à maintenir le niveau intellectuel d’une nation, puisque les Italiens, de leur aveu, sont encore plongés au bout de cette période d’indifférence littéraire dans une atmosphère peu favorable aux hautes études.

Nous admettrons plus volontiers avec M. Arnold que le grand mérite de la révolution de 1789 fut de débarrasser l’Europe des vestiges du moyen âge, et que la renaissance scolaire en Italie date de l’occupation française. Enclin par nature, peut-être aussi par calcul, à favoriser les études scientifiques, Napoléon régénéra les écoles italiennes. En même temps qu’il créait à Pise une école normale sur le modèle de celle de Paris et qu’il reconstituait le collège médical de Naples sur des bases sérieuses, son frère le roi Joseph convertissait les couvens en écoles, et fondait des lycées dans les provinces à moitié barbares de l’Italie méridionale. Quoique enrayées par la réaction des années qui suivirent 1815, ces premières réformes donnèrent naissance à un courant d’idées progressives que l’on s’efforce de développer aujourd’hui avec plus de bonne volonté, hélas ! que de succès.

Nous avons trouvé l’instruction secondaire florissante en Écosse, et surtout en Prusse et en Suisse, où l’instruction primaire est universelle, moins développée dans l’Angleterre, qui néglige les écoles du premier âge. On sait aussi que la population des lycées et collèges de France s’est accrue à proportion des progrès que l’instruction faisait dans les classes pauvres. S’étonnera-t-on qu’en Italie, où les trois quarts des adultes ne savent ni lire ni écrire, les études élevées soient dans un déplorable état d’abandon? L’ancien gouvernement des Deux-Siciles s’opposait même à la fondation d’écoles primaires; il n’y en avait que quatre à Naples avant l’annexion. Les écoles publiques d’enseignement secondaire étaient inconnues. Les établissemens tenus par des moines n’enseignaient qu’un peu de latin, et négligeaient le grec aussi bien que les langues étrangères, l’histoire et les sciences exactes. Lorsqu’un édifice doit être reconstruit en entier, c’est par la base qu’il faut commencer. Il