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lorsque l’année 1865 vit la production journalière tripler et s’élever à 12,000 barils, provenant en partie de nouveaux puits, en partie de la reprise d’anciens travaux. Lorsque je passai dans le pays pendant cette même année, l’excès de production avait amené des prix tellement peu rémunérateurs que l’on fermait tous les puits qui ne donnaient pas plus de 12 barils par jour. C’était préparer à coup sûr un déficit pour l’année suivante, à moins de nouvelles découvertes, qui n’ont pas manqué. En résumé, ces péripéties, aujourd’hui contenues dans des limites raisonnables, ont conduit à ajouter chaque année quelques nouveaux centres de production aux centres déjà connus ; seulement, comme cela s’est fait sans règle ni prévoyance pendant la première période, il semble à celui qui parcourt les ravins d’Oil-Creek et les environs d’Oil-City qu’il traverse un pays récemment ravagé par la guerre. Les puits abandonnés, les derricks renversés, les chaudières gisant dans la vase ou déchirées par une explosion et roulées au fond d’un précipice, des maisons et des arbres incendiés, des bateaux coulés à fond, tels sont quelques-uns des traits frappans du paysage. A côté cependant apparaissent des agglomérations nombreuses où la vie et l’activité débordent, des steamers, des locomotives, des forêts de derricks et de machines à vapeur en mouvement. Tout ce pays était inculte, la terre végétale y est trop argileuse pour soutenir une population exclusivement agricole ; aujourd’hui les centres habités foisonnent sur un espace de quelques lieues carrées à peine. On peut estimer à 150,000 âmes au moins le chiffre de la population sédentaire.

En jetant les yeux sur une carte assez étendue pour que des exploitations de pétrole voisines puissent être distinguées l’une de l’autre, on aperçoit tout de suite qu’elles se développent suivant une ligne qui ne suit pas dans toute sa longueur le cours d’Oil-Creek, mais qui le traverse en conservant la direction générale donnée par le prolongement de la vallée de l’Ohio vers le nord-est, direction qui demeure, sans dévier, parallèle à la crête des monts Apalaches ; c’est l’amplification, sur une étendue de 500 lieues, du phénomène qui a groupé les réservoirs de pétrole suivant les axes anticlinaux d’une localité circonscrite comme la péninsule canadienne. L’observation de ce fait a facilité beaucoup les recherches depuis quelque temps. A l’origine, les explorateurs ne s’éloignaient pas des bords mêmes d’Oil-Creek, parce que les nappes jaillissantes les plus fameuses y avaient été rencontrées. On s’arrêtait de préférence aux points où se montraient des suintemens d’huile, et il est clair que de tels indices doivent prédominer dans les lieux bas qui sont dénudés par la rivière et les torrens. L’opinion universelle était alors qu’on ne trouverait pas de pétrole en attaquant les terres hautes ; mais le nombre des chercheurs était immense, et, les trous