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nationale et de la Banque toscane. Une dernière convention enfin a trait à la vente des biens ecclésiastiques, et confie cette opération à l’ancienne société des biens domaniaux, agrandie et complétée par l’adjonction du directeur de la Banque nationale et d’une maison française. Ces diverses combinaisons auront pour résultat de conduire au rétablissement prochain du paiement en espèces, et de mettre à la disposition de l’état, sous forme d’avance ou de garantie, une somme de 400 millions qui suffit à ses besoins du moment, en attendant que le déficit disparaisse peu à peu par le mouvement naturel des choses. Or ce sont justement ces projets qui sont devenus un prétexte de divisions nouvelles, de dissidences assez vives. Ils ont été représentés comme livrant l’état à un grand établissement financier, comme portant atteinte au principe de la liberté des banques. Le comité privé de la chambre s’est montré récalcitrant ; la commission nommée pour formuler des propositions est manifestement hostile, et la question reste en suspens. Ce n’est pas tout, au milieu de ces malaises a éclaté d’une façon imprévue un incident des plus délicats, qui a mis en ébullition tout le monde parlementaire : c’est une accusation de corruption lancée contre un député ministériel à l’occasion de l’affaire des tabacs. Cette accusation s’est produite d’abord dans un petit journal de Milan, qui a été condamné comme diffamateur par les tribunaux ; du journal, elle a passé dans la chambre, où elle a provoqué une demande d’enquête. Un des chefs de la gauche, M. Crispi, a pris une attitude mystérieuse, prétendant connaître des faits qu’il ne pourrait révéler qu’à une commission parlementaire. L’enquête est devenue inévitable, elle a été réclamée par tout le monde. Il en est résulté, au lendemain même de la reconstitution du ministère, une situation tendue, embarrassée, moins nette que jamais. Pour ce qui est de l’enquête, elle n’est point une difficulté pour le cabinet, elle a fourni au contraire à la majorité une occasion de se rallier. Quant aux projets financiers, c’est une autre affaire, c’est la question épineuse.

A ne voir que la logique apparente des choses, l’opposition qui s’est révélée pourrait conduire certainement à un conflit entre la chambre et le gouvernement, et un vote hostile pourrait conduire à une crise ministérielle ou à une dissolution du parlement ; mais les Italiens ont cela de bon qu’ils ne tiennent pas absolument à être logiques, qu’ils savent s’arrêter sans aller jusqu’au bout des difficultés, et en fin de compte M. Cambray-Digny, battu dans un comité privé, pourrait bien retrouver la victoire dans la discussion publique. Dans tous les cas, la pensée qui a présidé à la dernière reconstitution du ministère italien ne resterait pas moins une pensée, juste, patriotique, faite pour rallier tous les esprits sérieux et prévoyans. Ce rapprochement des partis qui s’est opéré ne peut rester en chemin ; c’est une garantie, c’est pour l’Italie le meilleur moyen de se préparer à la solution de toutes les questions intérieures ou extérieures. Et maintenant, de notre côté, allons-nous envoyer un nouveau