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de généraliser. Il ne paraît pas reconnaître une autre psychologie que celle qui résulte de l’histoire de l’homme comparée à l’histoire des animaux. Aussi croit-il « qu’à un certain point de vue la psychologie tout entière est du domaine de la physiologie. » Et en effet, la manière dont il explique les phénomènes moraux, particulièrement les actes volontaires, fait comprendre comment l’analyse psychologique rentre dans la physiologie. Selon lui, les volitions ne sont jamais primitives ; elles ne peuvent engendrer une action qu’à la condition d’être précédées par une idée qui les fait naître et les soutient. On ne peut pas vouloir à blanc, c’est-à-dire sans objet, pas plus qu’on ne peut faire un mouvement de déglutition sans avaler de l’air ou une matière quelconque, de la salive, par exemple. Pour que les mouvemens du pharynx puissent s’effectuer, il faut une cause excito-motrice ; pour la volonté, il faut nécessairement des causes excito-volitionnelles. Ces causes seront des idées plus ou moins complexes, des idées avec désir, des idées passionnées. « À ce point de vue, qui est le seul vrai, les volitions, ainsi que l’admettent plusieurs physiologistes modernes, peuvent et doivent être envisagées comme des phénomènes d’action réflexes[1]. » Ceci n’est qu’une application de la méthode générale de l’auteur, qui, dit-il, pourrait montrer que la plupart des phénomènes de l’entendement se produisent par un mécanisme semblable.

Cette psychologie toute physiologique dont M. Vulpian n’a fait qu’indiquer la méthode, un autre physiologiste de la même école, M. Lhuys, essaie de la développer dans un système complet d’explication des phénomènes psychiques. On avait montré que tout acte de la vie psychique a pour condition physique telle ou telle partie de l’organisme. M. Lhuys va plus loin : pénétrant plus avant dans la constitution des tissus organiques, il croit pouvoir expliquer le travail même qui se fait au sein des organes pour y produire les phénomènes psychiques. Il semble que l’auteur ait assisté à ce travail, tant il met de précision dans son langage ; Voulez-vous voir naître la sensation de l’impression sensitive ? M. Lhuys vous montrera comment les fibres sensitives ont des fonctions diverses, les unes étant les conducteurs dolorifères des impressions douloureuses, les autres les agens de transmission des impressions tactiles ; comment ces impressions diverses, parvenues dans les régions supérieures du système nerveux, se superposent en quelque sorte dans l’entendement, s’y combinent pour y former nos différentes espèces de sensations. Voulez-vous voir naître de cette même impression la réaction cérébrale que les psychologues appellent

  1. Physiologie générale et comparée du système nerveux, p. 105 et suiv.