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volonté ? M. Lhuys vous indiquera comment l’acte volontaire n’est que la répercussion plus ou moins immédiate d’une impression sensitive antérieure, par conséquent qu’un effet dont la véritable cause est l’action organique extérieure. Voulez-vous voir sortir toujours de la même origine les autres phénomènes de l’entendement ? M. Lhuys vous expliquera comment les impressions sensitives, irradiées des centres de la couche optique au milieu des réseaux de la substance corticale, y prennent une forme distincte, se déposent à l’état de souvenirs, et se transforment en idées, en jugemens, en raisonnemens. Tout acte intellectuel n’est qu’une impression transmise au cerveau et convertie en idée par un travail des cellules cérébrales. L’impression est donc le véritable corps simple, l’élément primordial plus ou moins latent qui est au fond de nos idées. Ce travail de composition des idées se fait d’une manière analogue à celui des élémens organiques. Les idées élémentaires s’agglomèrent à notre insu sous l’action incessante des cellules cérébrales et par une sorte d’anastomose qui relie chaque idée à ses congénères.

Comment le cerveau (la substance grise corticale) peut-il être un principe de transformation pour les impressions sensorielles dont il fait successivement des perceptions, des idées, des actes instinctifs ou volontaires ? D’où lui vient cette force créatrice ? Comment est-il ce puissant et ardent foyer d’élaboration qui opère de telles métamorphoses ? C’est que les cellules de la substance corticale grise ne sont point des appareils inertes, incapables de réactions spontanées, et seulement aptes à enregistrer les impressions sensitives au fur et à mesure qu’elles leur parviennent. Outre ces propriétés passives, les cellules cérébrales possèdent des propriétés dynamiques d’un ordre supérieur qui en font des individualités vivantes pouvant non-seulement absorber et transformer les impressions sensorielles, mais encore réagir à distance par une sorte « d’automatisme spontané, » et propager leur activité vers les cellules environnantes. Et cet automatisme spontané n’est point propre à la cellule cérébrale ; il est commun à toutes les cellules de l’organisme humain et de l’organisme de tout être vivant. Pourquoi cette activité des cellules vivantes ? L’auteur n’avait qu’un pas à faire pour donner la main à la philosophie des monades ; mais il ne se pose pas ce problème, trop métaphysique pour intéresser un physiologiste. Il s’en tient à son principe d’explication comme au dernier mot de la » science[1].

Voilà comment l’école nouvelle entend l’explication des grands phénomènes de la vie psychique. Cette méthode, plus

  1. Système nerveux cérébro-spinal, p. 314, 322, 352, 359, 371, 379, 381.