redoutables matières qu’il ne faut ni jactance ni forfanterie, que tout zèle inutile est coupable et compromettant. Dans sa jeunesse, il a côtoyé la magistrature, et de ce contact il a gardé quelque chose de froid et de réservé qui tromperait singulièrement, si l’on se laissait prendre aux apparences, car il a pour son œuvre une ardeur de dévoument dont il a donné des preuves nombreuses. C’est par lui que la justice veille, et il l’aide à remplir son mandat de protection. Petit, trapu, grisonnant, ayant le visage soigneusement rasé, il a l’air au premier aspect d’un paisible notaire de province. Lorsqu’on a regardé attentivement ses petits yeux bleus, qui ont des étincelles qu’il ne parvient pas toujours à éteindre, quand on l’a vu manier un criminel, multipliant les nuances de l’interrogatoire, fuyant, revenant, faisant des feintes de dialectique comme on fait des feintes dans un assaut d’armes, on comprend qu’on est en présence d’un homme dont l’énergie, la pénétration et le sentiment du devoir ne peuvent être mis en défaut. Il procède à l’égard des criminels avec une probité imperturbable, et, quand il leur a fait une promesse, il la tient toujours, à quelque prix que ce soit. Si c’est habileté, on ne peut que l’approuver, car la confiance qu’il leur inspire a souvent amené des révélations inespérées. Je ne serais pas surpris que le souvenir de quelque bonté témoignée jadis à des forçats qui depuis se sont évadés et vivent hors de France lui ait valu des lettres pleines d’indications précieuses. C’est là du reste le secret professionnel, et l’on peut croire qu’il ne me l’a pas livré. Il mène sa petite troupe d’inspecteurs avec l’aplomb d’un vieux capitaine accoutumé au feu. Sa brigade est fort redoutée ; les malfaiteurs en savent quelque chose, et la haine qu’ils portent à ces hommes toujours en action pour notre repos doit valoir à ceux-ci l’estime des honnêtes gens.
Je ne me suis occupé jusqu’à présent que du service actif, il est temps de parler du service exclusivement administratif et de dire dans quelles larges proportions il concourt à l’œuvre commune. La préfecture de police est une personne fort soigneuse, elle aime l’ordre par goût, et l’expérience lui en a démontré la nécessité ; aussi elle ne perd rien, elle enregistre tout, et il n’est si mince chiffon de papier qu’elle ne conserve précieusement, et dont elle ne sache tirer bon parti à un moment donné. Les bulletins levés par les inspecteurs des garnis sont, je l’ai indiqué plus haut, collationnés et divisés alphabétiquement, de manière que les recherches y soient sûres, rapides et faciles. Tous les cochers de